Libérez votre cerveau

 (source : https://des-livres-pour-changer-de-vie.com/liberez-votre-cerveau/ )

 
Traité de neurosagesse pour changer l’école et la société

Phrase-résumée de « Libérez votre cerveau. Traité de neurosagesse pour changer l’école et la société » : Idriss Aberkane nous transmet avec humour et sans langue de bois une connaissance vulgarisée et donc accessible du fonctionnement de notre cerveau.
Par Idriss Aberkane, 2016, 278 pages.
Note : cette chronique est une chronique invitée réalisée par Laëtitia Seitz du blog bonheurminimaliste et Créer sa vie.
Chronique et résumé de « « Libérez votre cerveau » :
Dans Libérez votre cerveau, Idriss Aberkane décortique le fonctionnement de notre cerveau. Il utilise différentes études qui illustrent combien nous sommes conditionnés et manipulables. Il montre aussi comment, avec des simples outils neuroergonomiques, nous pouvons être plus libres et plus épanouis.
Serge Tisseron, psychiatre et psychanalyste qui a fait la préface, éclaire cette idée avec cette phrase : « Notre cerveau sera toujours plus grand que tout ce qu’il peut concevoir ».
L’auteur pense donc que mieux on connaît son cerveau, mieux on peut s’en servir, notamment en adaptant notre environnement à ses besoins. Il parle ainsi longuement de l’école (et aussi de certains fonctionnements dans les entreprises), en considérant son fonctionnement actuel comme étant totalement inadapté à la neuroergonomie.
Je tiens à préciser qu’Idriss Aberkane est un auteur qui crée beaucoup de polémiques à différents niveaux. D’abord parce qu’il remet en question le fonctionnement de nos institutions et les critique sans détour. Cela peut parfois sembler un peu caricatural et extrême mais il a le mérite d’ouvrir le débat sur des questions fondamentales comme celles de l’éducation. Il y a aussi plusieurs retours sur son impressionnant CV qui laissent penser qu’il aurait un peu enjolivé la réalité.
En ce qui me concerne, cela ne m’a pas empêché d’apprécierLibérez votre cerveau et j’ai préféré me concentrer sur les idées qu’il y propose.
Partie 1 : Libérez votre cerveau
Chapitre 1 : Entrez dans la neuroergonomie
Tout d’abord, l’auteur commence par nous rappeler que « le phénomène de l’intelligence humaine est bien plus « complexe, subtil et diversifié » qu’une mesure donnée par un Quotient Intellectuel ».
En fait l’évaluation quantitative est le seul moyen que nous avons trouvé pour évaluer et nous avons tendance à l’utiliser pour tout (et n’importe quoi), même si cela est un contre-sens.
  • Tous prodiges ?
Selon l’auteur, nous pouvons tous être prodiges. Chacun avec sa spécificité, sa spécialité et selon son identité. Même pas besoin d’avoir commencé très tôt ou d’avoir des facilités. Pour lui, il suffit pour cela d’une pratique persistante, engageante (qui nous implique) et passionnée soutenue par une motivation personnelle. Léonard de Vinci affirmait que l’amour est la source de toute connaissance. À l’inverse, obéir à une consigne comme à l’école amène de fait une certaine passivité qui compromet davantage la réussite.
Chapitre 2 : Oui, il faut tout changer à notre école !
  • Hackschooling : la nouvelle école buissonnière ?
Réussir sa vie c’est mettre en valeur sa spécificité, son identité.
L’auteur nous rappelle ici deux discours :
  1. Steve Jobs (2006) : “comment vivre avant de mourir” : “votre temps est limité, alors ne le gâchez pas à vivre la vie de quelqu’un d’autre. Ne vous laissez pas piéger par les dogmes car c’est vivre dans le résultat de la pensée de quelqu’un d’autre. Ne laissez pas le bruit des opinions des autres noyer votre voix intérieure. Et le plus important, ayez le courage de suivre votre coeur et votre intuition. Ils savent déjà, d’une certaine façon, qui vous voulez vraiment devenir. Tout le reste est secondaire”.
  2. Nelson Mandela: “Si vous voulez changer le monde, changez l’éducation!”
  • L’école des extraordinaires
C’est une folie de soumettre l’humanité à la conformité (scolaire, économique ou politique).
Il donne comme exemple Arthur Ramiandrisoa, bachelier a 11 ans sans avoir reçu aucune éducation formelle (Cf : son livre Mon école buissonnière) ou Logan Laplante, qui a fait la vidéo sur TEDX Hackschooling makes me happy.
Nous sommes tous des prodiges en puissance, pour peu qu’une connaissance ou une activité suscite en nous une pratique délibérée, persistante et inspirée.
L’auteur revient ici sur « les quatre piliers de l’apprentissage » selon le psychologue Stanislas Dehaene: l’attention, l’engagement actif, le retour d’information, la consolidation (cf: les grands principes de l’apprentissage).
Chapitre 3: Comment payer quelqu’un avec du papier blanc
  • On peut encombrer notre cerveau
L’auteur nous invite ici à imaginer notre cerveau comme une main : avec des actions qu’il peut ou ne peut pas réaliser en même temps, ses degrés de liberté, ses articulations, ses effets de levier et ses angles interdits/morts. Donc, de même qu’on peut réaliser une clé de bras, on peut mettre au point une “clé de cerveau”…sûrement beaucoup plus dangereuse.

Pour l’illustrer, l’auteur nous raconte un tour proposé par Derren Brown, showman britannique et mentaliste. Un mentaliste est un neuroergonome qui connaît bien les fonctionnements et dysfonctionnements de notre cerveau. Par ce tour où il arrive à payer des commerçants avec du papier blanc sans qu’ils ne s’en aperçoivent, il permet d’illustrer au mieux les enjeux de la neuroergonomie. Dans ce tour, la technique consiste à sursaturer le cerveau pour le forcer à réaliser d’autres tâches de manière automatique, sans esprit critique. C’est ainsi qu’il a pu payer une bague de 5000 dollars chez un bijoutier avec des papiers blancs. Il lui a suffi d’encombrer l’esprit du bijoutier avec une tâche spatiale un peu difficile et de le manipuler grâce à la formulation de certaines phrases de persuasion. Cela fonctionne parce que notre cerveau ne peut pas faire deux choses en même temps. J’avais déjà appris cela par ailleurs, que le « multi-tasking » n’existait pas…même pour les femmes !
  • Notre cerveau est saturable
Aussi prodigieux soit-il, notre cerveau a ses limites. Pour des raisons de survie, notre cerveau souligne bien plus les signaux négatifs que les signaux positifs.
Pourtant, l’inhibition réduit nos performances. Ainsi, ce que nous savons est plus “grand” que ce que ce que nous pensons savoir, et ce que nous savons faire est plus “grand” que ce que nous pensons savoir faire. Quand nous pensons que nous sommes incapables de réaliser une tâche, nous avons beaucoup plus de chances d’y échouer. C’est un cas typique de prophétie autoréalisatrice.
Rappelons-nous aussi que tout ce que nous ressentons relève d’une activité cérébrale…et n’a pas d’autre réalité que celle-là.
Partie II. Connaître votre cerveau
N’étant pas scientifique, cette partie m’a semblé plus compliquée. J’ai moi-même fait preuve de « cognitive miser » (expliqué un peu plus bas) en faisant des raccourcis et en me centrant sur les parties qui me parlaient davantage.
Chapitre 1. Qui est votre cerveau ?
  • Nos nerfs sont-ils un ordinateur ?
J’ai adoré qu’il conclue sa réponse à cette question par : « le vivant est l’entité la plus technologiquement brillante qui soit à notre disposition ».
  • Cognitive miser :
Notre cerveau est un « miséreux cognitif », qui cherche toujours à faire le moins d’opérations mentales possible. Quitte à faire des raccourcis, des pensées automatiques. Il préfère ainsi souvent la facilité à la vérité.
  • Stigmergies
« Use or loose » selon la fameuse expression (« utilise-le ou perds-le »). Plus nous révisons quelque chose, plus l’apprentissage se renforce en devenant des « rivières cérébrales ».
  • Notre cerveau est conçu pour l’action
Le cerveau sert avant tout au mouvement : notre pensée vient du mouvement et elle est elle-même un mouvement. Cela m’a fait penser à Nietzsche qui disait que « seules les pensées qu’on a en marchant valent quelque chose ».
Chapitre 2. La neuroergonomie pour l’économie des connaissances
  • Transférer de l’information, créer du savoir
Quelle est la différence entre information et savoir ? L’information est ponctuelle, le savoir et la connaissance eux sont reproductibles. Le problème est que nous produisons plus de connaissance que nous pouvons en transférer : nous avons besoin de modes pour mieux transférer la connaissance….et donc apprendre en groupe (« la vérité est comme un miroir brisé dont chacun possède un petit morceau ») et surtout donner envie d’apprendre.
Cet effet « wow » de l’apprentissage peut s’illustrer par les 3 étapes d’une bonne conférence:
Les techniques pour apprendre sont les mêmes que celles d’un bon restaurant, basées sur l’émerveillement:
  1. La surprise: “ça je ne le savais pas!”
  2. Le contentement: “je suis bien content de le savoir”
  3. La frustration (donner faim): “j’ai envie d’en savoir plus”
  • La loi de Soudoplatoff :
Il y a 3 règles concernant les échanges de savoir :
  1. Ils sont à somme positive. Donc pas de rivalité ni de perte pour les apprentissages : « quand on partage un bien matériel, on le divise, quand on partage un bien immatériel, on le multiplie ».
  2. Ils prennent du temps.
  3. Ils ne sont pas linéaires : si on ajoute un savoir à un autre, ça ne fait pas deux savoirs mais trois.
Chapitre 3. Dans l’éducation
L’auteur affirme sur un ton déterminé qu'”il ne faut pas forcer le cerveau à ressembler à notre école (gavage et conformité), il faut forcer notre école à ressembler à notre cerveau“.
Il nous rappelle aussi la citation de Steve Jobs: “quand vous aurez compris que le monde qui vous entoure a été construit par des gens qui ne sont pas plus intelligents que vous, et que vous pouvez le transformer, votre vie ne sera plus jamais la même”.
C’est une des clés importantes pour libérer votre cerveau.
Chapitre 4. Jouer, travailler, vivre
Jouer est partout et de tout temps la meilleure façon d’apprendre. La preuve en est que toutes les espèces utilisent cette méthode formidable. Le plaisir est une condition primordiale pour potentialiser les apprentissages et la can-do-attitude.

Malheureusement, les institutions peuvent encourager, volontairement ou non, l’impuissance apprise, qui est la cannot-do-attitude. Ajoutez à cela que l’ego est le plus grand destructeur de valeur dans une institution…Le résultat de tout cela n’est pas toujours beau à voir.
Pourtant, notre cerveau choisit souvent de rester dans l’institution, quitte à être dans le faux. Il préfère le malsain connu à un monde sain mais inconnu.
Chapitre 5. Marketing, politique et journalisme
Le marketing contemporain repose sur la frustration permanente. Cette frustration est dangereuse parce qu’elle porte en elle une possibilité de violence.
Concernant le journalisme, il est important de prendre en compte les 4 biais de l’information :
  1. Biais de la confirmation : ce que nous appelons “faits” est en fait un souvenir. Notre cerveau nous encourage à former des souvenirs partiaux en faveur de nos croyances et à oublier ce qui nous déstabilise.
  2. Biais de la mémorisation : nos souvenirs, en plus d’être partiaux, sont peu fiables.
  3. Biais d’échantillonnage : ce dont nous nous alimentons a déjà  été sélectionné partialement par les médias.
  4. Biais de la sidération : une mauvaise nouvelle est plus marquante qu’une bonne (réflexe de survie… À l’ère glaciaire une mauvaise nouvelle c’était la mort).
Chapitre 6. L’homme augmenté…homme aliéné ?
L’auteur nous met ici en garde. Nous ne savons pas le recréer et nous voudrions le bricoler, le customiser?
Donner de la ritaline aux enfants pour qu’ils suivent à l’école inverse le problème : soigner des bien-portants alors qu’on devrait soigner l’école.  Si l’homme s’augmente pour se conformer à une chose créée par les humains, il devient esclave. La conformité envahit déjà toute notre vie, si elle envahit notre cerveau…
PARTIE III.  Quelle neurosagesse?
Ici l’auteur nous invite à prendre le chemin de la « neurosagesse », en commençant par se poser les questions suivantes : Qui sert qui ? Qui contraint qui ? Qui meurt pour qui ?
Il cite Isaac Asimov qui a rappelé qu’une civilisation qui produit beaucoup de connaissances et peu de sagesse est menacée d’autodestruction. Rabelais nous avait déjà dit avant “science sans conscience n’est que ruine de l’âme”. L’humain est plus grand que toutes ses créations (école, hôpital…).
Dans ce chapitre, il commence par nous présenter son propre parcours. Ses études universitaires sont impressionnantes : université Paris-Saclay, l’Ecole Normale Supérieure (qu’il décrit comme l’enfer), l’université de Cambridge (« le paradis ») et de Stanford. Son premier doctorat a porté sur la géopolitique de la connaissance, son deuxième de la présence soufie dans la littérature occidentale et le troisième en préparation sur la contribution de la neuroergonomie et du biomimétisme à l’économie de la connaissance. C’est suite à une dépression nerveuse qu’il s’est intéressé à la neuroergonomie. C’est pour lui une invitation à observer sa propre vie mentale, sa propre subjectivité pour éviter qu’elle ne prenne le contrôle.
Il cite ici Pauli : “tout ce qui est bon pour vous et bon pour la nature est cher, tout ce qui est mauvais pour vous et pour la nature est bon marché: qui a conçu ce système ?”
Nos nerfs ne sont pas faits pour être pressés. La neuroergonomie sert à nous rendre conscients que certaines pratiques mentales peuvent endommager le fonctionnement de notre cerveau.
“Mon cerveau est sacré, mes nerfs sont sacrés, ce ne sont pas à mes nerfs de servir ton système mais à ton système de servir mes nerfs”. Nous avons beaucoup de mal à apprécier ce que nous pouvons obtenir pour rien (air, cerveau,…) en confondant prix et valeur, valeur et rareté.
À l’image de nos muscles, le cerveau peut dépérir ou avoir une « hernie ». Notre cerveau a horreur d’exercer une tâche sans en connaître la raison; l’évolution l’a créé pour ne pas se prêter à ce genre d’exercice et pour traverser des états mentaux diversifiés.
Pour conclure, l’auteur nous conseille 7 exercices de gymnoétique (gymnastique de l’esprit) pour garder un cerveau libre et en pleine forme
1. Pratiquez la subjectivité limpide
Il s’agit « d’observer son esprit » selon les termes bouddhistes ou « observer sa vie mentale » en termes neuroscientifiques. Concrètement, c’est observer les biais, limites, automatismes, réactions conditionnées de notre esprit. Nous sommes alors plus à même de reconnaître sa subjectivité et l’illusion que nous pouvons nous donner d’être « objectifs ». Il s’agit pour l’auteur d’une hygiène mentale pour se protéger de la pollution nerveuse interne et externe.
« Si l’hygiène corporelle nous paraît évidente parce que nous sommes devenus conscients de notre corps, nous ne sommes pas conscients de notre mental. Eh bien, s’entraîner à une haute conscience de sa vie mentale, en faire une seconde nature, c’est ça, pratiquer la subjectivité limpide ».
J’ai envie de rappeler ici la citation de Montaigne citée en préface « La vraie science est une ignorance qui se sait ».

2. Sachez désinstaller une “application”
Ici l’auteur nous invite à faire le tri dans nos applications qui peuvent avoir été installées dès la naissance. Comme pour les téléphones, il est important de savoir désinstaller les applications énergivores pour éviter de ramer !
« Si vous pratiquez la subjectivité limpide, vous identifierez les pourriciels inutiles, dangereux et castrateurs qui se sont installés dans votre mental à votre insu ». Il nous rassure en nous disant que même si nous avons l’impression de nous amputer d’une partie de notre identité en désinstallant un pourriciel, rien n’est plus faux… « Reprendre le contrôle de sa vie mentale est toujours une libération ».
3. Passez de l’impuissance apprise à la puissance apprise
Vous êtes beaucoup plus puissant que votre éducation ne vous le fait croire nous répète I. Aberkane. Il considère l’impuissance apprise (« je ne le mérite pas », « je n’en suis pas capable ») comme le pourriciel le plus dangereux et répandu dans l’humanité. Nous sommes emprisonnés par des chaînes mentales qui nous empêchent de réaliser notre plein potentiel.
4. Soyez un néophile libéré
Après avoir pratiqué la puissance apprise, qui découle de la désinstallation des pourriciels et de la subjectivité limpide, on pourra se demander : « Quelle est la dernière fois que j’ai fait quelque chose pour la première fois ? »
En effet, en passant de l’impuissance à la puissance, nous nous autoriserons davantage à faire de nouvelles activités, à nous lancer dans de nouveaux challenges et à devenir des « néophiles », des passionnés du nouveau.
5. Pratiquez l’Exploration ou l’art de la Flexibilité mentale
Plus on pratique la néophilie, plus on étend sa vie mentale. L’auteur la compare à un muscle qu’on étire : plus souple, plus adaptable et donc capable de postures plus variées. D’où l’importance d’équilibrer l’exploitation (normative, sensible à la carotte et au bâton) avec l’exploration (créative, ouverte, imaginative, non conforme).
Le scientifique américain Alexander Wissner-Gross a défini l’intelligence par la capacité à se réserver un maximum de liberté d’action, un maximum d’options ouvertes. Des systèmes libres sont la base pour construire des systèmes intelligents…et l’intelligence, c’est la liberté.
6. Pratiquez la méthode des Lieux
Pour mémoriser des informations, rien de mieux que de spatialiser sa pensée. « Le palais de votre vie mentale commence par l’espace, mais il se poursuit par la mémoire émotionnelle et la mémoire d’association ». Burton dit « fais de ta pensée un empire ». Cet outil renforce la pratique de la subjectivité limpide et la puissance apprise.
7. Ignorez vos Pairs!
« Les pairs nous mettent à leur niveau, mental, intellectuel, spirituel… ». Pour pouvoir être libre, il est nécessaire de se détacher de l’opinion des autres. « Si l’intelligence c’est la liberté, alors l’intelligence repose sur la capacité à penser par soi-même, sans s’inquiéter de ce que pense autrui ».
Burton recommandait : “Fais ce que ton humanité t’ordonne, n’attend d’applaudissements de personne d’autre que toi-même. Il vit le plus noble et meurt le plus noble celui qui suit les règles qu’il a créées pour lui-même. Toute autre vie est une mort Mort-Vivante.”
Et pour se rappeler de cette gym plus facilement, cela donne SAINELP : Subjectivité, Application, Impuissance, Neophilia, Exploration, Lieu, Pairs.
Conclusion de «Libérez votre cerveau» :
Je recommande ce Libérez votre cerveau à toutes les personnes désireuses de mieux connaître le fonctionnement de son cerveau. Même si certains passages sont difficiles, il est globalement accessible.
Libérez votre cerveau est révolutionnaire pour beaucoup d’entre nous. Je savais bien que notre environnement avait une influence (énorme) sur nos apprentissages et l’épanouissement de nos compétences mais je n’avais pas mesuré à quel point. Par ailleurs, même en le sachant, il est difficile de savoir comment en tirer profit et Idriss Aberkane nous donne vraiment un mode d’emploi très facile à utiliser dans sa vie.

Sources of Power (les sources du pouvoir)



Traduction : Sources de Pouvoir – Comment les Personnes Prennent des Décisions

Phrase-résumée du livre Les sources du pouvoir : Nous devons tous prendre des décisions, et parfois il s’agit de décisions ayant des conséquences importantes, voire dramatiques, qui doivent être prises dans des conditions difficiles et avec une forte contrainte de temps ; comment les pompiers, les militaires, les médecins prennent-ils des décisions rapides quand des vies sont en jeu ? Les sources du pouvoir nous l’explique en nous détaillant diverses théories illustrées par des histoires et des cas d’études.
Par Gary Klein, 1998, 300 pages
Note : ce livre étant dense et complet, je publie son résumé en deux parties. Ceci est la première. La deuxième se trouve ici.
Chronique du livre :
En 1984, Gary Klein a effectué sa première étude de terrain pour comprendre comment les personnes prennent des décisions, en particulier sous des contraintes importantes de temps. Il s’agissait d’étudier comment les pompiers font des choix dans le feu de l’action, dans le cadre d’un contrat passé avec l’US Army. Parmi les prédictions qui étaient faites à l’origine de l’étude, l’auteur et son équipe pensaient que les chefs pompiers n’auraient sur le terrain que peu de temps pour penser à toutes les options et qu’ils considèreraient deux options : celle qui était intuitivement leur favorite, et une autre qui leur servirait de comparaison pour montrer pourquoi l’option favorite est la meilleure.
Cette hypothèse venait des travaux de Peer Soelberg en 1967. Ce dernier était professeur au MIT et enseignait à ces élèves comment prendre des décisions en utilisant une stratégie de choix rationnel, décomposée en cinq étapes :
  1. Identifier les options
  2. Identifier les moyens d’évaluer ces options
  3. Pondérer chaque dimension de l’évaluation
  4. Calculer la note
  5. Prendre l’option avec le score le plus haut
Pour sa thèse, Soelberg étudia comment ses étudiants faisaient un choix naturel et déterminant : choisir leur premier job alors qu’ils finissaient leur cursus. Il découvrit que ses étudiants n’utilisaient pas la stratégie de choix rationnel, mais suivait plutôt leur instinct et faisaient le choix pour lequel ils avaient le plus de feeling. En interviewant ses élèves, Soelberg pouvait identifier leur travail favori et prédire leur choix définitif avec un taux de réussite de 87%, 3 semaines avant que les étudiants n’annoncent leur choix.
Quand Soelberg leur demandait s’ils avaient fait un choix, ils le niaient, expliquant qu’un choix se fait en étudiant plusieurs possibilités, comme Soelberg le leur avait appris. Cependant Soelberg remarqua que les étudiants, afin de ressentir le fait qu’ils avaient pris une décision, avaient tendance à prendre une autre offre, à la comparer avec leur choix favori, et essayaient ensuite de montrer à quel point celui-ci était préférable. Puis ils annonçaient comme étant leur décision le choix instinctif que Soelberg avait identifié au préalable. Ils ne prenaient ainsi pas de décision; ils construisaient une justification.
Gary Klein et son équipe ont donc émis l’hypothèse que les pompiers feraient la même chose. Mais étrangement, alors qu’ils interviewaient des capitaines de caserne, il apparaissait que ceux-ci ne semblaient jamais comparer deux options simultanément. Certains capitaines insistaient même sur le fait qu’ils ne prenaient jamais de décisions, dans le sens d’examiner deux ou plusieurs options en même temps pour évaluer les forces et faiblesses de chacune. Ils n’avaient tout simplement pas le temps. Tout aurait brûlé avant qu’ils aient le temps d’examiner toutes les options, sans même parler du fait de les évaluer et des les comparer. Découvrons le système décisionnel que les pompiers utilisent.
  • Chapitre 3 : Le modèle de prise de décision basée sur la première constatation
En approfondissant, les chercheurs se sont rendus compte que les capitaines ne refusaient pas de comparer des options : ils n’avaient pas à le faire. Les capitaines sont des pompiers expérimentés. Même face à une situation complexe, ils peuvent voir ce qu’il y a de familier et savoir comment y réagir. Leur expérience leur permet donc d’identifier immédiatement une première chose à faire pour répondre à une situation, et ils ne s’ennuient ainsi pas à penser à d’autres. Ils ne sont pas retors. Ils sont compétents. C’est ce que les chercheurs appellent le modèle recognition-primed decision making (prise de décision basée sur la première constatation) ou modèle RPD.
Mais alors est-ce que cela veut dire que les pompiers mettent systématiquement en oeuvre la première chose qui leur vient à l’esprit ? Non. Ils évaluent la faisabilité et les chances de succès de la première option qui leur vient à l’esprit. Si ces deux paramètres leur semblent trop faibles, alors ils repoussent cette première option et en évalue une seconde, et ainsi de suite, sans comparer deux possibilités en même temps. C’est ce que les chercheurs appellent l’approche par évaluation singulière ou singular evaluation approach, pour la différencier de l’approche comparative.
Les deux ne sont pas difficiles à distinguer : quand vous commandez un menu, vous allez probablement comparer tous les plats proposés pour trouver celui qui vous plaît le plus. Si vous êtes dans une ville que vous connaissez peu et que votre jauge d’essence est au plus bas, vous allez commencer à rechercher des stations services et vous arrêter à la première qui vous semble bien, sans comparer toutes les stations services de la ville pour trouver le meilleur rapport qualité/prix. Ainsi la singular evaluation approach est-elle une stratégie poussant à prendre une décision satisfaisante. C’est très différent du fait de prendre une décision optimisée : pour être satisfait, il suffit de prendre la première décision à laquelle on pense qui convient , pour optimiser, il faut considérer un nombre important de choix et ne retenir que le meilleur. Cette stratégie de décision satisfaisante fait évidemment immédiatement sens lorsqu’on la place dans des situations d’urgence comme celles que vivent les pompiers.
Mais dans ce cas, comment les pompiers peuvent-ils éliminer ou retenir une option s’il ne la compare à aucune autre ? Ils utilisent la simulation mentale : ils imaginent mentalement la scène à partir de l’option qu’ils envisagent, et voient les conséquences se dérouler dans leur tête. Si ces conséquences leur plaisent, ils retiennent l’option. Sinon ils simulent mentalement le déroulement d’une autre décision.
Comme nous le verrons plus bas, une simulation mentale n’est pas exempt de failles. Mais souvent, c’est le meilleur outil disponible et utilisable dans le laps de temps imparti.
Avant de commencer cette étude, l’auteur pensait que les novices sautaient de manière impulsive sur la première option à laquelle ils pensaient alors que les experts examinaient avec prudence les mérites de chaque option. Il semblait en fait que ce soit l’inverse qui soit vrai : les experts savent ce qu’il faut faire et pensent donc immédiatement à une solution viable face à un problème, alors que les novices doivent comparer différentes approches, alors qu’ils n’en ont parfois pas le temps.

Au final Gary Klein et son équipe ont classifiés les 156 décisions qu’ils ont répertoriés lors de ces études en 4 catégories :
Choisir à partir d’options qu’on leur donne

Evaluation comparative
18 (la moitié provient d’un cas où les pompiers n’avaient aucune expérience)
Décision créative (imagination de solutions n’ayant pas été utilisées auparavant)
11
RPD, basé sur la singular evaluation approach
127
Ainsi près de 80% des décisions étaient prises en utilisant l’approche par évaluation singulière du modèle RPD.
Applications
Un des premiers enseignements à tirer de cette analyse est d’être sceptique à propos des méthodes de décision formelles. Ce sont des méthodes que les personnes utilisent rarement.
  • Chapitre 4 : Le Pouvoir de l’Intuition
L’intuition dépend de l’utilisation de l’expérience pour reconnaître des modèles clés qui sont des indicateurs de la dynamique de la situation. Parce que ces modèles sont subtils, les personnes ne peuvent souvent pas décrire ce qu’elles ont remarquées, ou comment elles ont jugées une situation typique ou non typique.
Ainsi, l’intuition a une réputation étrange. Les décideurs expérimentés savent qu’ils peuvent dépendre de leur intuition, mais en même temps ils peuvent ne pas faire beaucoup confiance à une source de décision qui semble si accidentelle. L’auteur a pu commencer à l’analyser lorsque l’un des pompiers qui l’interviewait lui indiqua qu’il sauva sa vie et celle de ses hommes grâce une Expérience Extra-Sensorielle (EES). Voici son histoire :
C’est un simple incendie de maison dans une maison sans étage dans un quartier résidentiel. Le feu est derrière, dans la zone de cuisine. Le lieutenant envoie son équipe de tuyau dans la maison, vers l’arrière, afin d’asperger d’eau l’incendie, mais le feu rugit juste de plus belle.
“Bizarre”, se dit-il. L’eau devrait avoir plus d’impact. Ils essayent de l’asperger encore, avec les mêmes résultats. Ils reculent de quelques pas pour se regrouper.
Puis le lieutenant commence à sentir que quelque chose ne va pas. Il n’a aucun indice; il ne sent juste pas bien à l’idée de rester dans cette maison, donc il ordonne à ses hommes de sortir du bâtiment – une maison tout à fait standard avec rien qui sorte de l’ordinaire.
Aussitôt que ses hommes ont quitté la maison, le plancher sur lequel ils se tenaient s’effondre. S’ils étaient restés à l’intérieur, ils auraient été précipités dans les flammes en dessous.
“Un sixième sens”, assura t-il, et une part importante de la compétence de chaque chef de caserne expérimenté. Quelques questions révélèrent les faits suivants :
  • Il ne soupçonnait absolument pas qu’il y avait une cave dans la maison.
  • Il ne suspectait pas que le foyer de l’incendie se trouvait dans la cave, juste en dessous du salon où lui et ses hommes se tenaient avant qu’ils n’évacuent.
  • Mais il se demandait déjà pourquoi le feu ne réagissait pas comme il l’aurait dû.
  • Le salon était plus chaud que ce à quoi il se serait attendu pour un petit feu de cuisine d’une petite maison.
  • Tout était très calme. Les incendies sont bruyants, et pour un feu de cette chaleur, il se serait attendu à plus de bruit.
Le modèle complet ne tenait pas. Ces prévisions ne produisaient pas comme il l’attendait. Après coup, il est évident que le salon était chaud et silencieux parce que les flammes se trouvaient en-dessous, et que donc le plancher masquait le bruit de l’incendie. Mais sur le coup rien d’autre ne le laissait entendre. Ainsi les évènements n’étaient pas typiques, et sa réaction a été de battre en retraite, de se regrouper, et d’essayer de comprendre mieux ce qui se passait.
L’expérience du lieutenant lui a donné un ensemble ferme de modèles. Il était accoutumé à se faire une opinion de la situation en faisant en sorte qu’elle corresponde à un de ces modèles. Il n’était peut-être pas capable d’articuler ces modèles pour en décrire les caractéristiques, mais il s’appuyait sur la concordance avec le modèle pour qu’il ait confiance dans la reconnaissance de la situation dans laquelle il se trouvait.
Néanmoins, il ne semblait pas conscient de comment il utilisait son expérience car il ne l’utilisait pas de manière consciente et délibérée. Il pouvait voir ce qu’il avait en face des yeux, mais pas ce qu’il y avait derrière eux, donc il a attribué son expertise à une expérience extra-sensorielle. Il fut à la fois fier de comprendre que son intuition venait directement de son expérience, et dépité de comprendre qu’il n’avait pas eu de perception extra-sensorielle.
Applications
Pour développer son intuition, il faut donc étendre notre expérience, en s’exposant à de nombreux cas difficiles.
  • Chapitre 5 : Le Pouvoir de la Simulation Mentale
La simulation mentale est la capacité d’imaginer des personnes et des objets consciemment et de faire transformer ces personnes et ces objets via de nombreuses transitions, pour se les représenter finalement d’une manière différente qu’au départ. Ainsi, c’est un processus de construction de diapositives permettant de se représenter ce qui va se passer.
Ainsi, imaginez que vous ayiez un camion, tel qu’il est représenté à gauche, et que vous souhaitiez le faire tenir en équilibre sur une pile de grandes briques, tel que cela est représenté à droite, en utilisant seulement un cric et une quantité de pierre illimitée, et en étant seul.
 
Comment allez-vous vous y prendre ?
Pour tenter de trouver une solution, vous allez vous figurer plusieurs images mentales des étapes nécessaires pour y parvenir, en évaluant la faisabilité de celles-ci, et en vous figurant d’autres étapes si celle-ci vous semble impossible.
Ainsi, les trois premières étapes pourraient être de soulever l’arrière du camion avec le cric, puis d’y placer une pile de briques :
 
Ensuite, vous pourriez faire la même chose avec l’avant, puis placer une pile de briques au milieu et retirer celles aux extrémités :
Vous pouvez vous figurer ces étapes de manière visuelle, ou sous forme logique, mais dans les deux cas il s’agit d’une simulation mentale dans laquelle vous imaginez une succession d’étapes différentes qui mèneront au résultat souhaité.
Tous les humains utilisent ce système lorsqu’il s’agit d’imaginer une solution pour résoudre un problème. Mais les simulations mentales ne fonctionnent pas toujours. Notre cerveau ne peut appréhender la réalité que partiellement, et il y a donc une limite aux variables que nous pouvons prendre en compte dans une simulation mentale. Parfois nous oublions ou ne prévoyons pas un ou plusieurs paramètres et rien se passe comme nous l’avions prévu.

En fait, d’après l’auteur et son équipe, nous construisons rarement des simulations mentales comprenant plus de trois facteurs. Les limites de notre mémoire de travail – la mémoire temporaire servant pour nos actions dans le moment présent – doivent être prise en compte. Et en général, les simulations mentales ne construisent pas plus de six étapes : au delà, cela semble saturer notre mémoire de travail et rendre l’élaboration des simulations plus difficile. Nous devons donc assembler nos simulations avec ces contraintes.
Il y a bien sûr de nombreuses manières de contourner ces contraintes. Si un sujet nous est très familier, nous pouvons rassembler de nombreuses transitions en une seule étape, et faire de même avec les différents facteurs à prendre en compte. De plus avec la bonne expertise, nous pouvons choisir le bon niveau d’abstraction. Une autre manière de contourner ces contraintes  est d’utiliser l’écriture, et de tracer des diagrammes pour garder une trace des transitions.
Le problème se complexifie lorsque des parties mobiles interagissent entre elles à chaque étape, car nous devons nous rappeler de bien plus d’éléments, et même les diagrammes deviennent inutiles au fur et à mesure que les flèches se chevauchent et se superposent pour représenter les interactions.
En considérant tous ces facteurs, le fait de construire des simulations mentales ne peut plus sembler facile. Nous devons être très familier avec la tâche que nous simulons et y penser au bon niveau d’abstraction. Si la simulation est trop détaillée, elle déborde notre mémoire de travail, et si elle est trop abstraite, elle ne nous aide pas beaucoup. En fait, si nous comparons notre cerveau aux puissants supercalculateurs dans lesquels les scientifiques et les militaires investissent des millions de dollars, nous pouvons dire que notre cerveau a une capacité de simulation très souple et perfectionné, et douée d’imagination – contrairement aux supercalculateurs – mais dispose d’une mémoire de travail extrêmement réduite. Un ordinateur dispose d’une mémoire énorme et peut suivre des milliers de variables et d’interactions en même temps, mais est un outil très spécialisé et ne peut simuler que des environnements pour lesquels il a été spécifiquement programmé.
Comment les simulations mentales peuvent échouer
Le plus grand danger de l’utilisation de la simulation mentale est que vous pouvez imaginer toutes les évidences qui vont corroborer votre estimation de la situation. Malheureusement, si vous êtes suffisamment déterminé, vous pouvez ne jamais abandonner l’idée que votre simulation mentale est Vraie et correspond à la réalité. Au fur et à mesure que des contradictions à votre simulation mentale surviennent, vous pouvez toujours continuer à croire en celle-ci en imaginant des explications de plus en plus poussées et compliquées.
Ainsi, Sir Francis Galton, à la fin du XIXème siècle, tenta une expérience afin de voir s’il pouvait comprendre ce que ressentent les paranoïaques. Il essaya de maintenir la croyance selon laquelle toutes les personnes qu’il rencontrait complotaient contre lui. Deux personnes qui parlaient le regardaient soudain ? Ils faisaient partie du complot. Un cheval s’écarte de lui quand il l’aperçoit ? Même les animaux sont contre lui. Galton continua autant qu’il pu mais dû abandonner avant la fin de la journée. Ses explications paranoïaques devenaient tellement convaincantes qu’elles commençaient à échapper à son contrôle, et il eut peur pour son propre équilibre mental.
Une des raisons de ce problème est qu’une fois que nous avons construit une simulation mentale, nous avons tendance à tomber amoureux d’elle. Que nous l’utilisions comme une explication ou pour faire des prédictions, une fois qu’elle est achevée, nous pouvons lui donner plus de crédibilité qu’elle n’en mérite, en particulier si nous ne sommes pas très expérimenté dans ce domaine.
En dépit de ces limitations, les simulations nous permettent de prendre des décisions habiles et de résoudre des problèmes dans des conditions où les stratégies de décisions analytiques traditionnelles ne peuvent s’appliquer.
Applications
Des chercheurs ont imaginés une méthode pour permettre aux personnes d’être plus sensibles aux interprétations alternatives d’une situation. Il faut demander à quelqu’un de vous donner une explication au sujet de quelque chose, explication dans laquelle il aura la plus extrême confiance. Puis, dites-lui que vous avez une boule de cristal qui vous a dit que cette explication est fausse. La boule de cristal ne vous a pas montré pourquoi. Il faut que la personne trouve par elle-même une autre explication, ce qui l’aidera grandement à voir que la même situation peut avoir des interprétations différentes.
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  • Chapitre 7 : Simulations Mentales et Prise de Décision
Les simulations mentales sont utilisées à au moins trois reprises dans le modèle RPD :
1 – La conscience de la situation
Un des aspects basiques du modèle RPD est que les personnes expérimentées peuvent appréhender une situation et juger si elle est familière ou typique, ou non. Souvent ce jugement se fait si vite et automatiquement que nous n’en sommes pas conscient.
Parfois cependant, nous devons essayer de donner un sens aux différents indices. La simulation mentale est une manière de donner un sens aux événements et de créer une explication.
La conscience d’une situation peut être formée rapidement, par un recoupement intuitif des modèles, ou délibérément, par la simulation mentale. Parfois une situation nous rappelle un événement précédent, et nous essayons d’utiliser l’analogie pour comprendre ce qui se passe.
2 – Attentes
En diagnostiquant une situation, les personnes construisent une simulation mentale de la façon dont les évènements ont évolués et de la manière dont ils vont continuer à évoluer. Au plus les décideurs sont expérimentés, au plus les attentes sont claires et précises.
En vérifiant si les attentes sont satisfaites, le décideur peut juger de l’adéquation de la simulation mentale. Au plus grande est la différence et aux plus d’efforts il faut pour expliquer les différences conflictuelles, au moins le décideur aura confiance dans sa simulation mentale et son diagnostic.
3 – Champs d’action
Quelqu’un qui a appréhendé une situation sera conscient de plusieurs manières typiques d’y réagir.
Nous avons vu avec le modèle RPD qu’une personne pourra choisir la première idée qui lui passera par la tête, sans s’ennuyer à en essayer d’autres, en particulier quand elle est pressée par le temps. Mais peu d’entre nous sont assez impulsifs pour toujours agir de la sorte, et la plupart des décisions majeures ne sont pas prises de cette manière.
La simulation mentale permet de jauger de nombreuses manières d’agir, en les acceptant ou les rejetant, une à la fois, sans avoir besoin de les comparer entre elles. Les pompiers prennent la majorité de leurs décisions ainsi. Les études montrent que les grands joueurs d’échec font de même. Mais il y a certainement des moments pour comparer les options plutôt que de les évaluer une à une. Par exemple, des chercheurs ont montrés que lorsque des pilotes de ligne doivent dévier de leur trajectoire et atterrir à un aéroport différent, ils comparent simultanément les avantages et inconvénients de chaque. Bien que la simulation mentale joue un rôle, les pilotes n’utilisent pas le modèle RPD ici, car même avec un temps restreint, il y a parfois des moments où vous avez besoin de comparer différentes options.

Cette manière de prendre une décision après avoir dûment comparé les avantages et inconvénients de chaque option entre elles est un bon exemple du modèle de choix rationnel. Les chercheurs ont analysés différentes décisions dans différentes situations, et les ont classées en fonction de leur appartenance au modèle rationnel ou au modèle RPD :
Conditions des tâches
Décisions basées sur le modèle RPD
Stratégies de choix rationnel
Grande contrainte de temps
Plus probablement

Plus grande expérience
Plus probablement

Conditions dynamiques
Plus probablement

Objectifs non quantifiables
Plus probablement

Besoin de justification

Plus probablement
Résolution de conflits

Plus probablement
Optimisation

Plus probablement
Complexe

Plus probablement
Examinons chaque ligne du tableau plus en détails. Les personnes sont plus susceptibles d’utiliser des stratégies d’évaluation singulière (une à la fois) quand :
  • La contrainte de temps est grande. Dans ce cas, évaluer chaque option les unes par rapport aux autres et déterminer les critères de comparaison et d’analyse prend trop de temps.
  • Les personnes sont plus expérimentées dans ce domaine. Avec de l’expérience, les personnes ont davantage confiance dans le fait que les premières actions qu’elles envisagent sont les bonnes.
  • Les conditions sont dynamiques. Le temps et les efforts nécessaires pour mettre sur pied une analyse détaillée peut être gaspillé en pure perte si les conditions changent.
  • Quand les objectifs sont non quantifiables. L’ambiguïté rend difficile l’élaboration de critères d’évaluation qui s’appliquent à toutes les options.
Au contraire, les personnes sont plus susceptibles d’utiliser une évaluation comparative quand :
  • Ils doivent justifier leur choix. Des autorités hiérarchiques recherchent en général des preuves que des alternatives ont été envisagées.
  • La résolution de conflits est un facteur. Quand les différentes parties en conflits ont différentes priorités, il est important de trouver des critères de comparaison communs qui placent toutes les attentes dans un même format.
  • Le décideur essaie d’optimiser, pour trouver la meilleure manière d’agir. C’est à cela que sert fondamentalement la comparaison. L’évaluation singulière tente de trouver la première solution acceptable, mais nécessairement la meilleure.
  • La situation est complexe. Si c’est quelque chose que personne ne peut facilement reconnaître ou se représenter, comme l’analyse d’un portefeuilles d’investissement pour trouver la meilleure stratégie.
Les chercheurs ont également identifiés puis analysés un grand nombre de décisions dans différents métiers, et ont déterminés le pourcentage d’entre elles qui font appel au modèle RPD :
Métier étudiés
Nombre de décisions
Décisions utilisant le RPD
Capitaines pompiers urbains
156
80%
Capitaines pompiers spécialisés et experts
48
58%
Capitaines pompiers novices
33
46%
Chef de peloton de tanks
110
42%
Capitaines gérant un incendie de forêt
Décisions fonctionnelles
Décisions organisationnelles
110
76
31
51%
56%
39%
Ingénieurs concepteurs
51
60%
Escouade de combat
27
96%
Capitaine de navire AEGIS
78
95%
  • Chapitre 8 : Le Pouvoir de Détecter les Points de Levier
Cette section explore les moyens qu’utilisent les personnes pour utiliser des points de levier – une petite différence qui créé une grande différence, un petit changement qui peut retourner une situation – afin de créer une nouvelle chaîne d’actions, et la façon dont elles remarquent quelque chose qui peut causer des difficultés avant qu’il n’y ait un quelconque signe de troubles.
Un point de levier est une focalisation dans le but de construire une solution. C’est le point de départ pour une résolution de problème perspicace. Si vous devez déplacer un rocher, vous pouvez appuyer votre épaule dessus et pousser de toute vos forces pour contrer son énorme inertie, ou vous pouvez étudier le rocher et son environnement pour trouver la faille qui vous permettra d’exercer une petite quantité de force pour déplacer le centre de gravité du rocher et le faire bouger ou basculer. Les points de leviers jouent un rôle important dans un grand nombre de domaines, et les exemples abondent dans le milieu des affaires.
Par exemple, la réalisation par les ingénieurs de Boeing que les avions à réaction commerciaux auraient un énorme avantage sur les avions à hélices fut la création d’un grand point de levier. Les ingénieurs n’avaient pas encore conçu un tel avion et ils n’avaient pas de marché pour lui. Mais ils avaient un concept et la curiosité de voir ce qui allait se produire s’ils mettaient des moteurs à réaction sur un avion de ligne. Les compagnies rivales comme Douglas avec son DC-8 arrivèrent plus tard et ne purent jamais rivaliser commercialement avec cet avion. De même, l’exemple bien connu de Henry Ford réalisant qu’il pouvait fabriquer des automobiles en utilisant la production de masse pour réduire les coûts afin que la plupart des travailleurs puissent s’acheter sa modèle T est une excellente démonstration de la découverte et l’utilisation d’un point de levier. Avant cela, Ford n’était qu’une des trente entreprises d’automobiles américaines qui se battaient sur un marché de luxe réduit et artisanal.
De même les scientifiques,  les militaires, les sportifs, joueurs d’échecs et bien d’autres ont besoin d’identifier et d’utiliser des points de levier.
Les points de levier sont juste des possibilités – des points de pression qui peuvent amener à quelque chose d’utile, ou nulle part. L’expertise peut être utile pour les évaluer. Les experts savent comment les enregistrements sont compilés, qu’il s’agisse de cartes, de manuels, de tests de diagnostic ou de checklist de décollage. Ils savent quand il faut suivre les étapes et quand on peut faire des exceptions.
Nous devons aussi détecter les points de levier qui peuvent travailler contre nous, afin d’apprendre les faiblesses de nos plans. Ils sont parfois appelés goulets d’étranglement. En les détectant, nous nous donnons du temps pour prendre des actions préventives avant qu’un cas d’urgence ne se présente.
Note : bien que Gary Klein n’en parle explicitement, les points de levier sont tout simplement les 20% d’action qui amènent 80% de résultats.
Chronique et résumé du livre, deuxième partie :
  • Chapitre 9 : Aspects Non Linéaires de la Résolution de Problèmes
Le concept des points de levier (voir chronique précédente) ouvre une manière de penser à la résolution de problèmes comme un processus constructif. C’est constructif dans le sens où des solutions peuvent être créées à partir des points de levier et que la nature profonde de l’objectif peut-être clarifiée pendant que la personne résolvant le problème essaie de développer une solution.
Les points de levier de la résolution de problèmes requiert une approche non linéaire plutôt qu’une approche linéaire. La résolution de problèmes passe par quatre étapes :
  • Détection du problème
  • Représentation du problème
  • Génération d’options
  • Evaluation
Il n’y a pas d’étape de résultat, car chacune de ces étapes peut générer un type de résultat différent.
La détection de problèmes est en elle même un résultat, par exemple dans les stations de surveillance radar des militaires ou sanitaires d’un pays.
La représentation d’un problème est un autre résultat, parfois suffisant pour déterminer comment procéder : il y a certains professionnels du monde médical dont le travail consiste principalement à fournir une excellente représentation du problème. Produire des prévisions est en soi une spécialité professionnelle de nombreux métiers.
Générer un plan d’action est l’étape que la plupart des personnes considère comme le résultat de la résolution de problème. Mais quelque soit la manière dont les options sont générées, elles devront être évaluées, souvent en utilisant la simulation mentale.
Le processus d’évaluation peut conduire à l’adoption d’une option, ou en l’identification de nouvelles barrières et opportunités, qui demandent une autre résolution de problèmes.
Le schéma montre pourquoi l’ensemble est interactif et non-linéaire. Les objectifs affectent la manière dont nous évaluons le plan d’action, et l’évaluation peut nous aider à déterminer de meilleurs objectifs. Les objectifs déterminent la manière dont nous évaluons la situation, et les choses que nous apprenons à propos de la situation change la nature des objectifs. Les objectifs déterminent les barrières et les points de leviers que nous recherchons, et la découverte des barrières et des points de levier altèrent les objectifs eux-mêmes. La manière dont nous diagnostiquons les causes amenant cette situation affectent également les types d’objectifs qui sont adoptés. De plus, les points de levier dont nous prenons conscience s’étendent au delà de notre propre expérience et de nos propres capacités – à un autre niveau d’interaction.
Voyons à travers un exemple concret comment une entreprise a changé ses objectifs à cause de la façon dont elle a évalué son business plan. En évaluant un plan d’action, des cadres de l’entreprise découvrent une opportunité à un point de levier. Cette information les pousse à réviser leur objectif et les conduit à synthétiser un plan d’action plus étendu :
L’entreprise mère a un réseau de franchises. Chacune des franchises doit utiliser le télémarketing pour obtenir des clients, et chacune doit embaucher, former et manager les télémarketeurs, ce que les responsables de franchise trouvent pesants et ennuyeux.
Le directeur marketing de l’entreprise mère identifie ceci comme un problème, mais avec une solution évidente : l’entreprise mère peut centraliser le télémarketing en un seul lieu. Le président de l’entreprise est plutôt tiède à cette idée, car elle demande un investissement important. Alors il réalise qu’avec un groupe centralisé de télémarketeurs, il pourra développer son idée de faire de commandes directes par téléphone. A ce point il devient encore plus enthousiaste à propos de ce projet que le directeur marketing.
Alors que le directeur marketing et le président faisaient une simulation mentale du centre télémarketing proposé, le président a remarqué une possibilité nouvelle et différente. L’idée d’utiliser les télémarketeurs pour des ventes a augmenté le niveau d’aspiration du président et a changé la nature de l’objectif qu’il voulait poursuivre. Cette opportunité a également suggéré des séquences d’actions supplémentaires qui peuvent être facilement intégrées dans l’objectif initial d’aider les franchises.
  • Chapitre 10 : Le Pouvoir de Voir l’Invisible
Cette section est à propos de l’expertise. Un des manières de considérer les expert est qu’ils ont accumulés beaucoup de connaissances. Bien que cela soit indubitablement vrai, cela créé une image de personnes dont les cerveaux sont remplis par les faits, alourdis par une mémoire des connaissances, et appesantis par la sagesse.
Cependant Gary Klein a une approche différente : selon lui l’accumulation d’expérience ne pèse pas sur les experts : il les allègent. Les experts voient le monde différemment. Et souvent les experts ne réalisent pas que le reste d’entre nous n’arrivent pas à détecter ce qui leur semble évident.
Il y a beaucoup de choses que les experts voient et qui est invisible à tous les autres :
  • Des structures que les novices ne voient pas.
  • Des anomalies – des événements qui ne se sont pas produits et d’autres violations des attentes.
  • Le grand schéma (conscience de la situation).
  • La manière dont les choses fonctionnent.
  • Les opportunités et les improvisations.
  • Les événements qui se sont déjà produits (le passé) ou ceux qui sont sur le point de se produire (le futur).
  • Des différences qui sont trop petites pour que des novices les détectent.
  • Leur propres limitations.
Ces aspects de l’expertise peuvent être tirés des deux sources principales de puissance : la concordance du modèle à la réalité (l’intuition) et la simulation mentale. L’intuition permet à l’expert de détecter les choses typiques et de repérer les anomalies et les évènements qui ne sont pas produits. Le simulations mentales permettent de voir les choses qui se sont produites au préalable et les choses qui vont probablement se produire dans le futur.
Il y a également quelques sources additionnelles de pouvoir. La capacité de faire des discriminations fines utilise vraisemblablement un apprentissage perceptif, même s’il est difficile de le distinguer de la capacité à faire concorder un modèle à la réalité.
Ainsi les experts peuvent voir des différences qu’on ne peut même pas forcer les novices à voir. Par exemple pour les novices, tous les vins ont plus ou moins la même saveur, alors qu’un expert oenologue peut distinguer le goût de chaque vin, et même de chaque année de chaque vin.
L’expertise est donc davantage l’apprentissage de comment percevoir plutôt que de connaître.
Note : il est important de remarquer que l’on peut croire suffisamment à sa discipline pour s’en estimer expert alors que ladite discipline n’a aucun fondement sérieux. Par exemple, les devins de l’Antiquité s’estimaient expert dans l’art de lire l’avenir dans les entrailles des animaux, ou les inquisiteurs du Moyen-Âge dans l’art de détecter le démon chez les sorcières, alors qu’au lieu de percevoir des modèles, ils en inventaient qui n’avaient aucun rapport avec la réalité car il leur manquait un outil très important dans leur démarche intellectuelle : la validation de leur hypothèse par l’expérience. C’est le fondement de la démarche scientifique. Et elle manque, par exemple, aux astrologues, aux graphologues et à d’innombrables personnes, même à des génies comme Steve Pavlina. Faites donc attention quand vous élaborez des modèles à vous assurer que ceux-ci concordent avec la réalité en testant les hypothèses sur lesquelles vous vous appuyez. Sinon vous inventerez un serpent qui se mord la queue et les concordances que vous percevrez seront de purs produits de votre imagination auxquels vous accorderez une trop grande crédibilité.
Par exemple, si vous êtes astrologue il est vous est facile de déterminer de votre capacité à prédire l’avenir : écrivez vos prédictions au fur et à mesure, puis vérifiez ensuite qu’elles se sont produites, et faites une analyse statistique : combien de fois avez-vous eu raison ? Attention dans ce cas à ne pas laisser votre égo vous protéger en effectuant des prédictions suffisamment vagues et brumeuses pour qu’elles soient à peu près toujours valable quel que soit l’issue, ou en justifiant vos erreurs par de nombreuses raisons complexes et circonvolues.
  • Chapitre 11 : Le Pouvoir des Histoires
Nous serions écrasés si nous devions traiter tout ce que nous voyons, chaque élément visuel, comme un élément séparé, et devions comprendre les connexions à chaque fois que nous ouvrions les yeux ou les bougions d’un point à un autre. Heureusement, ce n’est pas nécessaire. Nous voyons le monde par des structures.
Selon la Gestalt ou Psychologie de la forme, nous avons des organiseurs puissants qui structurent le monde visuel en formes, et nous voyons naturellement des choses qui sont proches chacune d’elles. Ainsi, si un groupe d’oiseau vole au loin, nous le voyons comme un groupe, qui partage un état commun. A chaque fois que le groupe change de direction, nous n’avons pas à suivre la trajectoire de chaque oiseau individuellement. Si un oiseau quitte le groupe et commence à voler par lui-même, alors seulement remarquons-nous cet oiseau et acquiert-il une identité distincte. Il a cassé la structure précédente, ce qui créé un contraste qui attire notre attention.
Selon Gary Klein, nous organisons de manière similaire le monde cognitif – le monde des idées, concepts, objets et relations. Nous les lions en histoires. En comprenant comment cela se produit, nous pouvons apprendre à tirer un meilleur usage du pouvoir des histoires.
Une histoire est un mélange de nombreux ingrédients :
  • Protagonistes – les personnes qui sont dans l’histoire
  • Enjeu – le problème que les protagonistes essaient de résoudre
  • Intentions – ce que les protagonistes prévoient de faire
  • Action – ce que les protagonistes vont faire pour réaliser leurs intentions
  • Objets – les outils que les protagonistes vont utiliser
  • Causalité – les effets (à la fois attendus et inattendus) de la réalisation des actions
  • Contexte – les nombreux détails entourant les protagonistes et leurs actions
  • Surprises – les choses inattendues qui se produisent dans l’histoire
Dans une forme simple, les histoires relient tous ces ingrédients ensemble. En voici un exemple :
Unité de soin intensifs néonatals, années 90. Une infirmière surveille un nourrisson depuis plusieurs heures. Soudain, en quelques secondes, le bébé devient bleu foncé, presque noir. L’équipe médicale appelle immédiatement un médecin et un radiologue et se prépare à intervenir, persuadée qu’il s’agit d’un collapsus pulmonaire – problème fréquent pour les bébés placés sous respirateur artificiel – et qu’il faut donc percer la poitrine, y passer un tuyau et aspirer l’air pour permettre au poumon de se regonfler.
Mais l’infirmière est convaincu qu’il s’agit d’un problème cardiaque. Dès qu’elle a vu la couleur du bébé, elle a soupçonné qu’il était victime d’un pneumopéricarde : de l’air qui emplit la poche entourant le coeur et l’empêche de battre. Elle essaye donc d’arrêter les préparatifs de ses collègues en leur criant “c’est le coeur !”. Mais ses collègues lui désignent le moniteur cardiaque, qui indique que le coeur du bébé bat normalement. Elle insiste, écarte leurs mains et leur crie de se taire en plaçant un stéthoscope sur la poitrine de l’enfant.
Aucun son. Le coeur ne bat plus.
Un chirurgien néonatal fait irruption, et immédiatement l’infirmière lui met une seringue dans la main. “C’est un pneumopéricarde. Piquez le coeur”. Le radiologue, qui vient de recevoir les résultats des examens, confirme le diagnostic de l’infirmière. Le chirurgien insère la seringue dans le coeur et vide lentement la poche d’air qui l’empêche de battre. Le bébé est sauvé.
Plus tard, l’équipe compris pourquoi le moniteur les avait induit en erreur : il mesurait l’activité électrique, celle qui commande les battements du coeur, et celle-ci ne s’était pas arrêté : le coeur ne pouvait juste pas y répondre à cause de la pression de la poche d’air.
Des histoires comme celle-ci contiennent de nombreuses leçons et sont sont des outils d’apprentissage extrêmement efficaces, et riches d’enseignement, ce qui explique qu’elles abondent dans tous les milieux. Elles montrent comment le contexte peut amener les individus à prendre les mauvaises décisions, et mettent en lumière des relations causales non identifiées auparavant et les solutions inattendues que les protagonistes ont trouvés pour résoudre les problèmes.
Pour en savoir plus, je vous invite à lire mon résumé du chapitre 6 de Ces Idées qui Collent – Pourquoi Certaines Idées Survivent et d’Autres Meurent, qui s’intitule “Une histoire” et qui synthétise la majorité des idées de ce chapitre. Normal, les auteurs s’appuient sur le présent livre pour expliquer l’intérêt des histoires  .
  • Chapitre 12 : Le Pouvoir des Métaphores et des Analogies
Les personnes utilisent les analogies et les métaphores pour accomplir une grande variété de tâches difficiles : comprendre les situations, générer des prédictions, résoudre des problèmes, anticiper des événements et faire des plans. Une analogie est un événement ou un exemple tiré du même domaine ou d’un domaine proche de la tâche à entreprendre. Une métaphore provient d’un domaine différent.
Chaque expérience que nous avons, que nous l’ayions vécu ou entendu, peut servir d’analogie ou de métaphore. A chaque fois que nous accomplissons une tâche, nous pouvons utiliser cette vaste base de connaissances, remplie d’expériences et d’histoires et d’images.
Par exemple, lorsque Apple a conçu le Macintosh et le Lisa, utilisant des idées fournies par les Centre de recherche Palo Alto de Xerox, comme la souris et l’interface graphique, les concepteurs ont eu l’idée d’utiliser le bureau comme métaphore de ce qui se passe à l’écran. Les utilisateurs allaient utiliser des dossiers, des fichiers et des documents sur leur bureau virtuel, tout comme sur leur véritable bureau.
La logique du raisonnement métaphorique
Les métaphores affectent la manière dont nous voyons et interprétons les faits. Ainsi la métaphore “Les débats sont comme la guerre” nous dit que nous devrions attaquer les positions de l’autre, en particulier ses points faibles, tout en défendant les notres. La métaphore “Les débats sont comme la pratique de la musique” nous incline plutôt à utiliser les débats comme une opportunité pour trouver comment nous contribuons à la dissonance.
Les métaphores font plus qu’embellir nos pensées. Elles structurent nos pensées. Elles conditionnent nos sympathies et nos réponses émotionnelles. Elles nous aident à atteindre une conscience de la situation. Elles déterminent les choses que nous considérons comme évidentes et les résultats que nous poursuivons.
Des études ont montrés que les designers utilisent beaucoup les métaphores pour concevoir des produits innovants, s’inspirant souvent de produits déjà existants. Par exemple, les concepteurs des premiers traitements de texte utilisaient la machine à écrire comme métaphore, et le travail du concepteur de l’interface était de construire autour de cette métaphore en évitant les dissemblances. Ils devaient aussi afficher des avertissements afin de rappeler de sauvegarder régulièrement le fichier, ce qui est nécessaire sur un ordinateur et pas sur une machine à écrire.
La logique du raisonnement analogique
Lorsque nous tentons de résoudre un objectif diffus, une stratégie est d’essayer d’atteindre cet objectif tout en utilisant les échecs pour définir cet objectif plus clairement. Par exemple, si le matin avant de partir au travail ma voiture ne me démarre plus, mon objectif final est de la faire démarrer, mais il est diffus car le processus nécessaire pour la faire démarrer n’est pas défini puisque la cause de la panne n’est pas connue. Je peux donc effectuer divers essais/erreurs jusqu’à ce que je trouve la cause de la panne et que mon objectif se précise et devienne “mettre de l’essence” ou “changer le démarreur” ou “appeler le garagiste”.
Il y a une deuxième stratégie : trouver une analogie qui suggère les caractéristiques de l’objectif. Par exemple, si je me rappelle que j’ai laissé un jour par erreur les phares de ma voiture allumés et que cela a vidé ma batterie, je peux me dire que c’est ce qui se produit maintenant. Il me suffit alors de voir si les phares s’allument pour déterminer si la batterie est allumée. S’ils ne s’allument pas, alors mon vague problème devient précis et j’ai un processus complet qui s’enclenche dans mon esprit pour me permettre de résoudre la situation.
Les analogies permettent aussi servir à trouver des solutions. Je peux me rappeler par exemple qu’une fois quelqu’un ayant subi une panne de batterie a fait rouler sa voiture le long d’une colline, ce qui a permis de faire démarrer le moteur sans la batterie. Il n’y a pas de colline aux alentours, mais peut-être que si je demande à mes passagers de pousser la voiture cela produira le même effet ?
De plus, en prenant en compte les différences entre les analogies et la situation actuelle, nous pouvons ajuster l’analogie pour faire une prédiction.
  • Chapitre 13 : Le Pouvoir de Lire les Esprits
Cela arrive trop souvent. Vous avez envoyé quelqu’un faire une course simple, et il se trompe. Par exemple vous essayez de réparer un mug, et vous avez demandé à votre épouse d’acheter de la colle quand elle ira faire les courses. Ensuite votre épouse revient avec une colle qui ne fonctionne pas sur la céramique, et quand vous lui expliquez pourquoi cela ne fonctionnera pas, elle vous répond “Tu n’as rien dit à propos d’un mug. Tu m’as demandé de ramener de la colle, et c’est ce que j’ai fait. Est-ce que je suis supposé lire dans ton esprit ?”.
La réponse est oui. Quand nous faisons une requête – demander quelque chose ou passer commande – nous avons besoin que la personne lise notre esprit. Pour rendre cela possible, les deux parties doivent tendrent l’une vers l’autre. La personne qui fait la requête peut aider en spécifiant l’intention derrière la requête. La personne essayant de compléter la requête doit essayer d’imaginer ce que la personne veut vraiment, pour gérer elle-même les détails qui n’ont pas été explicités.
Ainsi, “peut-tu prendre un peu de colle quand tu iras faire les courses ?” ne semble pas être une requête difficile. Mais quand nous arrivons au rayon des colles, nous voyons qu’il y a de nombreux type de colles différentes : pour le bois, le verre, le métal, etc. Certaines superglues sont vendues avec des messages disant qu’elles fonctionnent à tous les coups. Est-ce que c’est vrai ou faux ? Est-ce que je dois dissoudre la colle après ? Est-ce qu’il faut une colle à prise rapide ? Etc.
En général nous ne pouvons pas indiquer tous les détails en avance. Si vous me faites une faveur, je dois me reposer sur votre capacité à lire mon esprit et imaginer comment je ferai tous ces choix. Je ne crois pas que je puisse anticiper tous les détails importants pour vous. Il y a quelques personnes en qui je n’ai pas confiance et à qui je ne vais pas donner de tâche difficile.
Examinons l’un des cas les plus dramatiques et pourtant méconnu d’incompréhension dans l’histoire :
Le Goeben était un croiseur Allemand stationné en Méditerranée à l’aube de la première guerre mondiale, et le seul navire militaire Allemand de cette zone. La marine Britannique le savait et était censé le trouver et le couler aussitôt la guerre déclarée.
Les Britanniques échouèrent : ils réussirent à trouver et à encercler le Goeben avec une douzaine de navires de guerre, mais, confus par des ordres ambiguës donnés par l’amirauté, il laissèrent le Goeben s’échapper et atteindre la Mer Noire et l’Empire Ottoman.
Ce simple fait eu des conséquences incalculables :
  • Il poussa les Ottomans à s’engager dans la guerre aux cotés des forces de l’Axe, alors que nombreux étaient les Ottomans qui hésitaient entre neutralité et engagement auprès des Alliés.
  • Il est possible que cette entrée de l’Empire Ottoman dans la guerre l’ai allongé de un ou deux ans, avec des millions de mort supplémentaires et l’entrée en guerre des États-Unis, qui voulaient rester neutre.
  • Le navire ferma l’embouchure de la Mer Noire, coupant 90% des importations et exportations navales Russe, et précipitant par une situation de manque la révolution Russe de 1917.
Comment cela est-il advenu ? Lorsque les forces Britanniques entourèrent le Goeben, le commandant des navires  n’était pas sûr de la manière dont il fallait interpréter les instructions de l’amiral Winston Churchill, qui indiquait : “A ce point ne vous retrouvez pas engagé dans une action avec des forces supérieures”. Bien que le Goeben soit entouré de douze navires britanniques, celui-ci disposait de canons de 28 cms, alors que la force britannique était composée de quatre croiseurs disposant de canons de 23.5 cm d’une portée inférieure, et de huit torpilleurs dont cinq allaient bientôt être à court de carburant. Le commandant pensa donc être dans une situation où il s’engageait contre une force supérieure et décida de faire une manoeuvre de regroupement plutôt que d’attaquer le navire Allemand, ce qui lui permit de s’échapper vers l’est et la Mer Noire.
Le problème est que Churchill n’avait jamais voulu dire cela. Ses instructions se référaient à la possible rencontre des navires Britanniques avec la flotte Autrichienne, et en aucun cas avec la rencontre de douze navire contre un ennemi, fut-il plus puissant que chaque navire individuel de la flotte Britannique. Lorsque Churchill appris la nouvelle, il fut abasourdi. Jamais il n’aurait cru que ses ordres puissent être interprétés de cette manière.
Ainsi le commandant a échoué à lire dans l’esprit de Churchill, à deviner l’intention derrière la phrase. Churchill aurait pu éviter cette erreur s’il avait ajouté des informations supplémentaires à propos des navires Autrichiens. Mais s’il devait clarifier chaque point de chaque ordre qu’il donnait pour éviter les ambiguïtés, son travail aurait été impossible.
La solution n’est pas de s’appesantir sur les détails. Ils prennent trop de temps, et ont leurs propres coûts. Nous pouvons prétendre que les règles et les procédures sont simples et claires, mais elles ne le sont pas. Par exemple, si vous donner à quelqu’un l’instruction d’appuyer sur un bouton quand une lumière verte s’allume et que la personne demande “qu’est-ce que le vert ?”, il n’y a aucun moyen de répondre. Nous supposons que nous vivons dans une culture commune avec cette personne où la signification du vert est connue, tout comme d’autres références partagées. Si nous devons travailler à expliciter chaque supposition derrière chaque requête, le travail en équipe et la coopération deviendraient impossible.
Intention
Dans une équipe, un grand nombre de choses positives surviennent lorsque l’intention est comprise et partagée par tous, par rapport aux équipes où l’on dit quoi faire aux personnes sans leur expliquer pourquoi. Cela améliore notamment significativement l’autonomie et diminue le besoin de surveillance. Voici les bénéfices :
  • Améliorer l’indépendance
    • Améliorer la performance des équipes en réduisant les besoins de clarification
    • Détecter les déviations par rapport aux intentions effectuées par le leader
    • Prévenir les erreurs à l’avance et anticiper les problèmes
  • Promouvoir l’improvisation
    • Réagir aux conditions locales sans avoir besoin d’attendre la permission
    • Reconnaître les opportunités qui ne font partie du plan
    • Définir des priorités afin de faire des choix de compromis
    • Continuer au delà du résultat sans avoir besoin d’attendre le prochain ordre
Mais comment communiquer l’intention ? On peut par exemple utiliser l’Intention du Commandement de l’US Army (voir le résumé du chapitre 1 de Ces Idées qui Collent – Pourquoi Certaines Idées Survivent et d’Autres Meurent), c’est à dire communiquer l’intention de la manière la plus concise et efficace possible. Elle véhicule en général ces informations :
  • Voici ce à quoi nous faisons face
  • Voici ce que je pense que nous devrions faire
  • Voici pourquoi
  • Voici ce que vous devriez surveiller
  • Maintenant, parlez-moi
Voici les sept types d’information qui peuvent être présentées à une personne pour l’aider à bien comprendre ce qu’elle doit faire :
  1. L’objet de la tâche (les objectifs aux plus hauts niveaux)
  2. L’objectif de la tâche (une image du résultat désiré)
  3. La séquence d’étapes dans le plan
  4. La logique du plan
  5. Les décisions clés qui peuvent devoir être faites
  6. Les anti-objectifs (les résultats non désirés)
  7. Les contraintes et autres considérations
Tous ces types d’information ne sont pas toujours nécessaires, mais cette liste peut être utilisée comme une checklist, pour déterminer s’il y a encore des détails à ajouter.
Il est également important de noter que la capacité de lire l’esprit d’une personne dépend de la familiarité que l’on a avec cette personne et de la clarté avec laquelle son intention a été définie.
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  • Chapitre 15 : Le Pouvoir de l’Analyse Rationnelle et le Problème de l’Hyper Rationalité
L’hyper rationalité est un désordre mental dans lequel la victime essaie de gérer tous les problèmes et décisions sur une base purement rationnelle, en s’appuyant sur des formes de raisonnement uniquement logiques et analytiques.
Elle est comparable à la rétinite pigmentaire, maladie des yeux conduisant à ne plus avoir de vision périphérique, qui est autrement plus gênante que la dégénérescence maculaire, qui conserve la vision périphérique mais empêche la vision centrale plus précise. Pour le comprendre, tendez votre poing le plus loin possible, puis levez votre pouce et contemplez votre ongle : l’ongle représente uniquement ce que vous verriez si vous étiez atteint de rétinite pigmentaire. Autant dire que cela vous handicaperait beaucoup et que vous auriez les plus grandes difficultés à vous mouvoir dans l’espace et à vous situer.
L’hyper rationalité est semblable, dans le sens où l’individu qui en est atteint tente de baser toutes ces pensées sur une seule source de pouvoir : la capacité d’appliquer des procédures rationnelles, alors que de nombreuses autres sources sont utiles, notamment si elles sont utilisées combinées entre elles.
L’analyse rationnelle est toutefois une source pouvoir puissante et spécialisée qui peut jouer un rôle limité dans de nombreuses tâches, un rôle dominant dans quelques tâches, et parfois pas de rôle du tout.
Pour penser rationnellement, nous devons effectuer différentes choses :
  • Décomposer. Nous devons analyser la tâche – casser la tâche, l’idée ou les arguments en petites unités et éléments basiques, afin de pouvoir les manipuler.
  • Décontextualiser. Puisque les contextes crééent ajoutent de l’ambiguité, nous devons essayer de trouver des éléments qui sont indépendants du contexte. Pour accomplir cela, nous essayons de trouver une manière formelle de représenter le monde, de le traiter comme une représentation, une image, un modèle. Nous essayons de construire des théories et des cartes qui se substituent au fait d’avoir une perception directe de la tâche ou de l’équipement.
  • Calculer. Nous appliquons une palette de procédures formelles sur les éléments, comme des règles de logique déductives et des analyses statistiques.
  • Décrire. Toutes les analyses et représentations devraient être ouvertes à l’examen public.
Malgré sa puissance, la pensée rationnelle a des limites :
  • Manque d’éléments de base
Effectuer une analyse signifie décomposer une situation ou un problème en ses constituants essentiels. Cependant, il n’y a pas de composants “primitifs” qui existent naturellement. Les composants sont définis arbitrairement et dépendent des objectifs individuels et de méthodes de calcul. Il n’y a pas de “bonne” manière de décomposer une tâche. Différentes personnes trouvent différents schémas. La même personne peut également trouver différents schémas en fonction des buts qu’elle poursuit. Si nous essayons de prédéfinir les éléments de base, nous devons soit travailler avec des tâches approximatives ou artificielles, ou prendre le risque de distordre la situation pour la faire correspondre aux soi-disants éléments de base.
  • Règles ambiguës
Les règles et procédures prennent une forme qui est plus ou moins du type si-alors (le fameux if-then en programmation). Elles semblent souvent simples, mais le plus difficile est de bien appréhender si la condition antécédente, le “si”, a été atteinte. C’est pourquoi les chercheurs préfèrent travailler en laboratoire sur des problèmes artificiellement libres de contexte qui ne souffrent d’aucune d’ambiguïtés. En dehors des laboratoires, il est difficile de faire en sorte que le contexte soit suffisamment limpide pour que tout le monde soit d’accord sur le fait que les conditions soient remplies. L’épisode du Goeben montre bien un tel exemple où le contexte rend difficile l’appréciation du fait que le “si” ait été atteint ou non : l’ordre de Churchill signifiait “Si vous rencontrez une force supérieure, alors ne livrez pas bataille”. Est-ce que le commandant de la flotte a violé cet ordre en estimant que le Goeben était une force supérieure à ses douze navires ?  Le contexte de la situation rend cette appréciation difficile.
  • Difficultés de mettre en place les calculs
Quand les calculs demandent à ce que les personnes estiment les probabilités, leur propre valeur ou de faire d’autres jugements non naturels, nous allons au devant de problèmes.
  • L’explosion des combinaisons
Les méthodes formelles d’analyse rationnelle se heurtent à des difficultés quand elles considèrent un grand nombre de facteurs. Voici ce que disent les chercheurs Schank et Owen :
Le problème avec les déductions est qu’il y en a trop à prendre en compte. Si, par exemple, nous faisons cinq déductions d’un fait, et cinq déductions supplémentaires de chacune de ces déductions et ainsi de suite, alors la complexité du fait de développer chaque chaîne de déductions devient au bout de quelques étapes écrasante. La puissance de traitement n’est pas infinie, que ce soit chez les humains ou les machines.
Ainsi il est important de comprendre que l’analyse rationnelle est une source de pouvoir qui a ses forces et ses faiblesses, et qu’il faut l’utiliser avec parcimonie et en harmonie avec d’autres sources de pouvoirs.
  • Chapitre 16 : Pourquoi de Bonnes Personnes Prennent de Mauvaises Décisions
Une mauvaise décision n’est pas, selon Gary Klein, définie en fonction du fait que le résultat soit bon ou mauvais ; une personne qualifiera une décision de mauvaise si le savoir qu’elle a gagné la conduira à prendre une décision différente si une simulation similaire se produit.
Comme nous l’avons vu, l’expertise peut fournir des importantes sources de pouvoir, autres que l’analyse rationnelle. Les personnes avec une plus grande expertise peuvent voir le monde différemment. Les experts repèrent les problèmes plus facilement, et ont des simulations mentales plus riches à utiliser pour diagnostiquer les problèmes et évaluer le plan d’actions. Ils ont plus d’analogies sur lesquelles s’appuyer.
L’expertise peut nous apporter beaucoup de problèmes. Elle peut nous amener à voir les problèmes d’une manière stéréotypée. Le sens de ce qui est typique peut être si fort que nous ratons des signes de contradiction subtils.
Le problème est encore plus criant lorsque l’on considère l’apprentissage à partir de l’expérience. Nous ne voyons souvent pas de lien clair entre la cause et l’effet. Trop de variables interviennent, et les délais temporels créent leurs propres complications. Si des managers voient qu’ils ont du succès – en faisant en sorte que leurs projets soient terminés dans les temps et en dessous de la limite de budget alloué – est-ce que ce succès provient de leurs propres compétences, de celles de leurs collaborateurs, d’une chance temporaire, d’interventions de cadres de plus haut niveau, un mix de tous ces facteurs, ou quelques autres cause ? Ce n’est pas facile de le dire.
Par exemple, les historiens ont beaucoup étudié la grande dépression ou crise de 1929. Franklin Roosevelt a été président des Etats-Unis en 1932 pour aider la nation à regagner sa prospérité, et il a mis en place de fortes actions. Certains historiens et économistes disent que ces actions ont eu un effet positif, d’autres disent qu’elles ont empirés la situation. La crise de 1929 a été un évènement majeur qui a été scruté à la loupe et pourtant même aujourd’hui, 80 ans plus tard, nous ne savons toujours si les actions de Roosevelt ont été efficaces pour redresser l’économie. La situation est tout simplement trop complexe pour être analysée.
A cause de ces difficultés à interpréter les relations de cause à effet, les hommes politiques ne peuvent pas atteindre de hauts niveaux d’expertise. Ils peuvent certainement apprendre les procédures nécessaires pour devenir politiciens, par exemple en allant aux comités les plus influents, en forgeant des liens avec des lobbyistes, en donnant des faveurs aux bonnes personnes. Mais ils ne peuvent pas apprendre les impacts à long terme de la législation qu’ils ont mis en place. Ils ne peuvent pas apprendre les dynamiques causales entre leurs lois et d’éventuels changements sociaux. Leur modèle mental n’est ni flexible ni riche.
Le chercheur Jim Schanteau suggère ainsi qu’aucune vraie expertise ne peut être construite quand :
  • Le domaine est dynamique
  • Nous devons prédire le comportement humain
  • Nous avons moins de chances d’avoir un feedback
  • La tâche n’est pas répétée suffisamment pour que nous ayons un sens de ce qui est typique
  • Nous avons fait trop peu d’essais
Sous ces conditions, nous devrions être prudent si nous supposons que l’expérience se transforme en expertise. Dans les domaines de cette sorte, l’expérience peut nous donner des routines fluides, qui montrent que nous faisons cela depuis un moment. Mais notre expertise peut ne pas aller au delà de la surface des routines ; nous n’aurions alors pas la chance de développer une expertise sur laquelle nous appuyer en toute confiance.
  • Chapitre 17 : Conclusions
Ce livre est une exploration des forces et capacités de l’être humain. En dépit des fantaisies de l’expérience, nous pouvons donner un sens raisonnable à notre monde. Même quand nous n’atteignons pas de haut niveaux d’expertise, même quand nous sommes confrontés à des facteurs d’incertitude et d’autres facteurs de stress, nous trouvons généralement des moyens d’atteindre et de peaufiner nos objectifs.
Critique du livre :
Ce livre est dense, et quelque peu lourd à lire en Anglais. Le résumer m’a pris plus de 10 heures, et j’ai sauté quelques chapitres qui m’ont parus moins intéressants que les autres. Mais quel intérêt, quelle puissance il dégage ! Bien loin des traditionnelles approches rationnelles de la prise de décision, Gary Klein nous emmène en dehors des sentiers battus pour nous expliquer que les personnes n’utilisent que rarement cette approche rationnelle, et nous donne de nombreuses autres manières de prendre des décisions, qu’il explique en mêlant merveilleusement théories et exemples concrets.
Il réhabilite ainsi l’intuition en la définissant et met en lumière les forces et limites de l’esprit humain d’une manière absolument saisissante. Après l’avoir lu et résumé, je m’interroge sur la transformation de ce nouveau savoir en actions concrètes, mais ce qui est certain c’est que j’ai upgradé mon esprit et que je perçois à présent de manière bien plus précise la manière dont l’esprit humain fonctionne et la manière dont nous prenons des décision. Mon modèle mental n’est pas du tout le même que celui que j’avais lorsque j’ai ouvert ce livre pour la première fois, et j’ai l’impression absolument prenante du fait que ce modèle est à présent bien plus acéré et pertinent. Ce qui est fort aussi, c’est que l’auteur met très bien en avant les limites de nos connaissances et de nos approches actuelles, et met particulièrement en valeur les biais qui peuvent corrompre les études scientifiques, tout comme l’infini complexité du cerveau humain et l’importance des choses qui nous restent à apprendre à son sujet.
J’ai donc du mal à percevoir aujourd’hui comment ce nouveau modèle mental se traduira concrètement, mais il est certain qu’il ne peut que me rendre plus prudent vis à vis de l’expertise, plus conscient de la relativité et des limites des savoirs, et de ce qui fonde l’efficacité du travail en équipe et les décisions qui sont prises quotidiennement.
Je le recommande donc. Ce livre est un vrai bijou de stimulation intellectuelle qui devrait faire bouillonner votre cerveau bien au delà de sa lecture  .
The Creative Habit (Devenir Créatif)



Titre en français : Devenir Créatif

Phrase-résumée de “Devenir Créatif”: La créativité s’apprend, se nourrit et s’entretient ; pour que l’inspiration coule en nous et jaillisse de notre esprit, il faut s’y préparer, avoir ses rituels qui la convoque, connaître son ADN créatif- ce pour quoi nous sommes fait, utiliser sa mémoire et relier des choses disparates entre elles, organiser ses documents de travail pour toujours savoir où les retrouver, savoir gratter la surface des choses pour en extirper l’essence, utiliser les accidents et incidents qui se manifestent dans nos vie, avoir une idée-fondation qui sert de colonne vertébrale à notre création, utiliser ses talents à bon escient, reconnaître les impasses et les moments où tout semble nous réussir, savoir échouer, et garder son souffle sur le long terme – jusque la fin.
De Twyla Tharp, 243 pages, publié en 2003.
Résumé et chronique de “Devenir Créatif” :
Tout d’abord, ce livre est beau. Non seulement d’un point de vue purement esthétique, comme l’est 45 méthodes efficaces pour Recruter avec discernement, mais aussi parce que de tous les livres de mon défi Personal MBA que j’ai lu, c’est celui qui mêle le mieux la forme et le fond, utilisant l’un pour renforcer l’autre. Etant écrivain amateur (de science-fiction), je suis particulièrement sensible à cela : pourquoi les livres d’aujourd’hui devraient-ils se contenter de tristes lettres noires sur fond blanc, alors que les technologies modernes permettent tant de créativité ? Il est temps que les écrivains comprennent que leur espace d’expression n’est pas cantonné aux seuls mots, mais aussi à la manière dont ils sont représentés.
The Creative Habit arrive brillamment à sortir de ce canevas hérité des siècles passés en utilisant une mise en forme originale et sobre pour mettre en valeur les éléments clés de son contenu. Cela passe par des mots mis en couleur, ou d’une taille de caractère plus grande que le reste de la phrase, ou d’un placement libre dans la page, ou de fonds de page grisés ou de dessins judicieusement disposés pour illustrer l’oeuvre. Le livre est ainsi un régal à lire et il est beaucoup plus facile d’en tirer l’essentiel – il suffit presque de lire les grands mots en rouge. Le livre qui utilise avec la plus grande excellence la forme pour mettre en valeur le fond – en arrivant presque à toucher la perfection – est The October Man Sequence, mais seuls les initiés le connaissent.
Exemples de la mise en forme agréable du livre
Mais la beauté de The October Man Sequence reste insurpassée. C’est une oeuvre d’art à part entière.
Twyla Tharp est une danseuse Américaine et chorégraphe, née en 1941. Elle a créé de nombreux ballets et comédies musicales dont la plupart ont été de grands succès et certains ont été joués à Broadway, elle a dirigé les séquences d’opéra du film Amadeus et a elle a reçu de nombreux prix pour sa carrière, commencée en 1965. Il y a sur Youtube de nombreux extraits de ses créations, et je vous invite particulièrement à visionner cet extrait de Movin’ Out – une comédie musicale basée sur les chansons de la star de rock Billy Joel – pour vous faire une idée de son travail.
Pour de nombreuses personnes, le commencement, symbolisé par le fait de se retrouver dans une salle vide, est quelque chose de profond, de mystérieux et de terrifiant. C’est ouvrir son logiciel de traitement de texte et se retrouver devant une page blanche. C’est prendre ses pinceaux et contempler sa toile vierge et immaculée. C’est prendre ses outils et se diriger vers son bloc de pierre brute. C’est être devant son piano, les doigts au dessus des touches – pour créer et non pour jouer.
L’espace blanc peut-être humilant. Certaines personnes ne peuvent le gérer, et choisissent de l’éviter. Pour Twyla Tharp, y faire face est son métier. Elle retrouve dans une pièce blanche vide un mélange de challenge et de trépidation, et aussi de paix et de promesses. Remplir cette pièce vide constitue son identité. Elle est devenue son toit. 
Or la créativité n’est pas l’apanage des artistes. Elle est importante pour les hommes d’affaires qui recherchent de nouvelles manières de vendre, pour les ingénieurs qui essaient de résoudre un problème, pour les parents qui veulent que leurs enfants voient le monde de plus d’une manière.
Nous pouvons avoir un don et être particulièrement doué pour créer dans un domaine en particulier, mais que nous ayons un don ou pas, il n’y a pas de créativité sans apprentissage, sans préparation et sans routines quotidiennes devenuent une seconde nature.
Pour être créatif, vous devez savoir comment vous préparer à être créatif.
C’est l’objet de ce livre.
Twyla Tharp nous fait donc partager le fruit de ses 35 années d’expérience pour nous aider à développer, entretenir et nourrir notre créativité, quelle qu’elle soit. Chaque chapitre – sauf le premier – est agrémenté d’exercices, pour nous aider à pratiquer les concepts qu’elle vient d’évoquer. J’ai inclus un résumé de ceux qui m’ont plus dans la revue chapitre par chapitre :
  • Chapitre 2 : Les rituels de préparation (rituals of preparation)
Tous les artistes ont des rituels – des habitudes automatiques et décisives – qui les aident à alimenter leur créativité et la renouveler chaque jour.
Un rituel permet de supprimer les questions – pourquoi je fais cela ? Est-ce que j’aime cela ? – qui peuvent se poser à vous quand vous vous réveillez le matin, l’esprit encore embrumé, et que votre motivation est au plus bas. Si vous avez créé intelligemment votre rituel, il s’agit d’une habitude que vous accomplirez tous les jours sans réfléchir et qui vous amènera tous les jours un peu plus vers votre objectif.
Par exemple, le compositeur Igor Stravinsky faisait la même chose tous les matins en arrivant au studio pour travailler : il jouait au piano une fugue de Bach. Ses raisons profondes sont connues de lui seul, mais à chaque fois qu’il avait terminé de jouer, son esprit était éveillé, ses doigts échauffés, son esprit focalisé sur la musique, et tout son être était enclenché dans le travail, comme s’il avait appuyé sur un interrupteur. C’est ce que sont les rituels – des habitudes répétées si souvent qu’elles induisent en nous un état d’esprit propice à ce que nous voulons faire.
De même, Beethoven commençait toutes ses journées avec le même rituel : une promenade matinale pendant laquelle il écrivait sur un carnet de notes les premières notes de l’idée musicale qui lui venait inévitablement à l’esprit.
Les exemples sont innombrables et pas seulement pour les artistes. Les rituels sont profondément enracinés dans l’âme humaine, et ont probablement étés inventés dans les sociétés primitives pour conjurer les peurs – quelles qu’elles soient. Les rituels ont bien changés depuis, mais leur objectif reste le même. Créez vos propres rituels, en vous concentrant sur le bénéfice que vous voulez en retirer. Puis restez-y collés. Voici un article pour vous guider dans la création de rituels.
    • Exercice 4 : Donne moi une semaine sans
Beaucoup de personnes font des diètes et des régimes. Pour ne pas en faire d’un autre genre ? Pendant une semaine, privez-vous de quelque chose qui fait partie de votre quotidien comme :
Les miroirs : Une semaine sans vous regarder dans la glace peut-être une expérience fascinante. Elle vous force à penser à vous d’une autre manière.
L’heure : Laissez votre montre dans un tiroir. Ne regardez pas les horloges. Arrêtez de dépendre de machines pour jauger le temps qui passe. Comment faisaient nos ancêtres, il n’y a pas si longtemps ?
Les journaux : Arrêtez de lire les journaux et les magazines pendant une semaine (online ou offline). C’est comme de prendre une semaine de vacances sur une île perdue. Qu’avez-vous perdu ? Et qu’avez-vous gagné ?
Parler : Pendant une semaine, ne dites que l’essentiel. Pas un mot superflu.
  • Chapitre 3 : Votre ADN créatif (your creative DNA)
Nous avons tous en nous des talents créatifs instinctifs, que Twyla Tharp appelle notre “ADN créatif”. Il se manifeste de différentes manières, et notamment par la distance de laquelle vous regardez le monde – est-ce que vous êtes attentifs aux détails ou plutôt à la vision d’ensemble ?
Si vous comprenez quel est votre ADN créatif, alors vous pourrez comprendre l’histoire que vous essayez de dire au monde, et vous pourrez voir comment cette histoire se déroule dans les fils quotidiens de votre travail. L’auteur propose 33 questions pour nous aider à définir notre biographie créative et à cerner l’ADN créatif sous-jacent.
  • Chapitre 4 : Utilisez votre mémoire (Harness your memory)
La mémoire est une des fondations de la créativité, non pas en tant que telle – il ne suffit pas de pouvoir réciter par coeur les sonnets de Shakespeare pour devenir un poète – mais parce qu’elle conserve des faits, des fictions et des sentiments que nous pouvons ensuite relier entre eux en trouvant de nouvelles manières de les connecter. Il s’agit de métaphores.

Or, la métaphore est l’âme de l’art, si ce n’est l’art lui-même. C’est la capacité de représenter, de substituer des choses par des symboles. La métaphore, comme l’écrit Cynthia Ozick, “transforme l’étrange en familier. C’est la règle même pour les métaphores les plus simples – la mer sombre comme le vin d’Homère, par exemple. Si vous connaissez le vin, dit l’image, vous verrez la mer”.
Si tout art est métaphore, alors l’art commence par la mémoire. Pour apprécier pleinement la puissance de votre mémoire, vous devez en apprécier ses formes les plus exotiques, cachées à la périphérie. Nous nous rappelons bien plus que ce que nous pensons, par des manières que nous n’envisageons pas :
    • La mémoire musculaire
La mémoire musculaire est une des mémoires les plus performantes. C’est le fait que, après la répétition diligente et l’entraînement de certains mouvements physiques, votre corps s’en souvient des années – et même des décennies – après que vous ayez cessé de les faire. C’est ce processus qui est à l’oeuvre pour les danseurs, les pianistes, les sportifs, les peintres, quand nous faisons du vélo…
La mémoire musculaire est utile dans le processus créatif, peut-être davantage pour acquérir des compétences que pour développer l’inspiration. Ainsi, il est possible de s’entraîner à l’écriture en recopiant ou en traduisant les oeuvres de ses écrivains favoris, pour comprendre comment l’auteur a structuré ses phrases, agencé ses mots, construit son histoire. Proust a passé 12 ans de sa vie à traduire et annoter les écrits de l’historien d’art Anglais John Ruskin, et a écrit dans Le Figaro des articles imitants le style d’écrivains du XIXème siècle comme Balzac ou Flaubert . Raymond Chandler a écrit des imitations du style d’Hemingway pour absorber ce qu’il appréciait le plus chez cet écrivain. C’est le même processus qui est à l’oeuvre chez un étudiant des Beaux-Arts qui prend son carnet de dessin et se rend dans un musée pour recopier pendant des heures la toile d’un maître. Les compétences s’affinent au cours de l’action.
Note : Étant écrivain amateur, je trouve cette suggestion fort judicieuse, alors qu’elle était jusqu’à présent associée confusément dans mon esprit à la lâcheté infâme du plagiat. Et pourtant, tous les écrivains sont inspirés par d’autres qu’ils admirent et ont construits leur style en lisant d’abord. Et j’apprend beaucoup en traduisant les articles de Léo Babauta sur Habitudes Zen – j’aime son style épuré, imagé et allant droit à l’essentiel. Mais je ne vois pas très bien ce que la mémoire musculaire vient faire là dedans. Pour un dessinateur ou un peintre passe encore, mais un écrivain ? Il me semble que nous retenons davantage les concepts, en traduisant ou recopiant, qu’un “mouvement de poignet” qui nous permettrait d’écrire de manière automatique de beaux passages s’inspirant du style de tel ou tel écrivain.
    • La mémoire virtuelle
C’est la capacité de se projeter dans les émotions et les sentiments de notre passé, et de les laisser s’exprimer physiquement – les acteurs font cela tout le temps. Elle peut également servir à visualiser le futur.
    • La mémoire sensuelle
Elle est extrêmement puissante elle aussi, c’est elle qui est à l’oeuvre lorsqu’une odeur ou une saveur ou un son ou une couleur vous plonge dans votre passé. Son emblème est la madeleine de Proust.
Nous l’avons tous expérimentée, en sentant une odeur qui nous a marquée pendant notre enfance – essayez les colles cléopâtre pour voir.
    • La mémoire institutionnelle
C’est la mémoire collective des organisations, de la petite association de quartier à la multinationale. Elle se trouve dans les archives et enfermée dans les cerveaux des personnes. Pour y accéder, il faut plonger dans les fichiers et écouter réellement les personnes qui y ont travaillés pendant longtemps.
    • La mémoire ancestrale
Selon l’auteur, c’est la mémoire, gravée en nous, de ce qui s’est passé avant.
Ainsi cette image est un kaléidoscope de centaines de fragments de poteries composé par le Docteur Yosef Garkinkel représentant la danse telle qu’elle se pratiquait il y a 5 000 à 9 000 ans. Quand Twyla Tharp la contemple, elle ressent une intense impression de déjà-vu. Si vous avez déjà dansé dans un groupe, vous pouvez sentir dans vos tripes que ces personnes sur la poterie sont vos aïeux.
Note : Je ne suis pas d’accord avec l’approche mystique de l’auteur. Pas besoin d’invoquer une quelconque mémoire ancestrale (qui serait stockée où ? transmise comment ?) pour expliquer le sentiment de compréhension et d’empathie qu’évoque une scène de danse, même plusieurs fois millénaires. Tous les êtres humains ont des fondamentaux universaux en commun. Le langage, la musique et la danse en font partie, tout comme la pensée symbolique et la capacité de créer des outils. Les humains parlent. Les humains chantent. Les humains dansent. Et ce depuis plusieurs dizaines de milliers d’années au moins. Nous avons certes tous en commun les bases génétiques nécessaires à ces comportements, mais cela ne constitue pas pour autant une mémoire, en tout cas pas au sens où l’entend Twyla Tharp.
    • Exercice 9 : Creuser pour la Mémoire dans une Photo
Trouvez une photo de vous étant bébé ou très jeune enfant. Qu’est-ce que vous voyez qui est indiscutablement annonciateur ou similaire à ce que vous êtes aujourd’hui, à votre vie ? Qu’est qui est vaguement similaire ? Qu’est-ce qui ne vous suggère rien ou ne ressemble pas à ce que vous êtes ? Qu’est-ce qui s’est terminé à l’opposé de ce que vous voyez ? Pourquoi ces quatre différents chemins ? Expliquez-le à vous même.
Vous pouvez aussi faire l’exercice avec n’importe quelle photo de vous, en famille ou non. L’objectif est de se connecter à quelque chose d’ancien pour qu’il devienne nouveau. Regardez et imaginez.
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  • Chapitre 5 : Avant de penser en dehors de la boîte, vous devez commencer avec une boîte (before you can think out of the box, you have to start with a box)
Dans ce chapitre, Twyla Tharp a une approche similaire à GTD. Mais là où David Allen a une approche sèche, très voire trop pratico-pratique, Twyla Tharp propose quelque chose de plus fluide, plus ouvert. Mais les fondamentaux sont les mêmes : avoir un système de classement permettant de retrouver facilement toute la documentation nécessaire à la réussite d’un projet. La mémoire, malgré toute sa puissance, est faillible. Avant de se lancer à corps perdu dans un projet, il faut se documenter au mieux pour disposer d’une base solide pour créer.
Il faut juste comprendre que la boîte n’est pas un substitut à la création. Elle ne compose pas ou n’écrit pas ou ne créer pas de pas de danse pour nous. C’est un outil, rien de plus. Il faut aussi faire attention à ce qu’elle se transforme pas en machine à procrastiner. De nombreuses personnes ayant un projet vont ainsi remplir leur dossier ou leur boîte du fruit de leurs recherches, recherches qui finissent par devenir inlassables alors que le projet en reste au point mort.
  • Chapitre 6 : Gratter (stratching)
Les premiers pas d’un acte créatif sont comme de tâtonner dans le noir : aléatoires et chaotiques, fébriles et craintifs, avec beaucoup de travail sans résultat apparent ou fin définissable. Vous ne pouvez pas juste danser ou peindre ou écrire ou sculpter. Ce sont juste des verbes. Vous avez besoin d’une idée tangible pour commencer. Cette idée, aussi minuscule soit-elle, est ce qui transforme un verbe en un nom – peindre en une peinture, sculpter en une sculpture, écrire en un texte, danser en une danse.
Pour trouver cette minuscule idée, rien de tel que de gratter. C’est comme de gratter un ticket de loterie pour voir si vous avez gagné : il s’agit de creuser dans tout pour trouver quelque chose. Gratter prend de nombreuses formes.
Vous pouvez gratter en lisant des livres, en faisant attention à votre environnement, en changeant d’environnement – en réservant un vol pour Rome par exemple, en ayant confiance dans le fait que vous trouverez votre prochaine grande idée dans cette ville inspirante – en regardant un film, etc. C’est prêter attention à certains petits détails qui vont vous inspirer, vous donner de petites idées qui nourriront ensuite vos grandes idées.

Vous devez pour cela vous ouvrir à la fois à vous-même et au monde. Le psychologue Américain Stephen Kosslyn dit que toutes les idées peuvent être décomposées en 4 étapes :
  1. Générer l’idée, généralement à partir de la mémoire ou de l’expérience ou de l’activité.
  2. Retenir l’idée. Je retiens de mon expérience, de GTD et du chapitre 5 qu’il faut la noter la plus vite possible. Au bon endroit.
  3. Examiner l’idée. L’étudier et faire des liaisons et des déductions à son sujet.
  4. Transformer l’idée. L’altérer d’une manière ou d’une autre pour qu’elle corresponde mieux à vos objectifs.
Idées pour rechercher des idées :
    • La lecture.
    • Les conversations de tous les jours, particulièrement pour ceux devant raconter des histoires, des commerciaux aux écrivains aux compositeurs de chansons.
    • Les travaux et oeuvres des autres personnes. Une visite à un musée ou une exposition peut vous donner une idée qui change tout.
    • Les mentors et les héros. Marcher dans les pas de quelqu’un de plus grand ou plus expérimenté que vous peut être bénéfique. Mais attention à ne pas vous transformer en imitateur plutôt qu’en créateur. Tôt ou tard, il vous faudra vous démarquer de votre mentor ou de votre héros.
    • La nature. Se plonger dans la richesse sans cesse renouvelée de la nature peut être une source incommensurable de créativité. Mozart et Beethoven, par exemple, étaient d’ardents amoureux des oiseaux et de leurs chants.
Note : Je suis entièrement d’accord avec l’auteur sur ce point. J’ai en permanence mon programme “écrivain” qui tourne en tâche de fond dans mon esprit. Je peux avoir des idées pour mes récits n’importe où et n’importe quand – en écoutant un podcast ou une émission de radio, en travaillant, en rêvant, en lisant, en rencontrant des nouvelles personnes, en discutant, etc. Je m’empresse de noter ces idées quelque part, puis de les ranger dans un système de classement que je connais bien et où je saurai les retrouver (j’utilise le logiciel OneNote). Je ne le faisais pas avant, et nombre de ces idées se sont évaporées alors que je pensais pouvoir m’en rappeler. Ne faites pas la même erreur.
    • Exercice 12 : Lire de manière archéologique
Plutôt que de lire des livres sur un sujet dans l’ordre chronologique, comme le font la plupart des personnes, essayez de commencer par les livres contemporains, puis remontez le temps jusqu’aux ouvrages fondamentaux. En philosophie par exemple, vous pouvez commencer par Nietzsche pour finir par Euripide.
Vous pouvez aussi lire l’oeuvre complète d’un auteur en commençant par son dernier livre pour finir par son premier. La lecture archéologique n’a pas pour but le plaisir, elle s’apparente à creuser un grand trou pour y trouver les pépites de l’oeuvre d’un auteur ou d’un thème particulier, puis de les travailler jusqu’à en extirper de nouvelles idées.
  • Chapitre 7 : Les accidents vont survenir (accidents will happen)
Il est important de planifier son travail pour pouvoir s’organiser efficacement. Mais il y a une différence entre planifier et rigidifier. Vous ne devez pas laisser un planning inhiber l’évolution naturelle de votre travail.
Un plan est comme un échafaudage autour d’un building. Quand on construit l’extérieur, l’échafaudage est vital. Mais une fois que le corps du bâtiment est construit et que l’on commence à travailler son intérieur, l’échafaudage disparaît.
Ainsi est le paradoxe de la créativité : pour être créatif, vous devez savoir comment vous préparer à être créatif, mais un bon planning ne suffira pas à couronner vos efforts de succès. Vous devez être ouvert aux incidents, aux accidents, aux changements. Vous devez être ouverts à la chance. La chance est une compétence. Pour être ouvert à la chance, il faut rechercher ardemment une solution à quelque chose et être attentif aux moindres signes qui vont dans ce sens.
Ainsi en est-il de la pomme de Newton (même si c’est certainement une légende, l’image reste valable), de la découverte de la vulcanisation du caoutchouc par Charles Goodyear, et de nombreuses autres découvertes scientifiques.
Pour être chanceux, vous devez améliorer votre tolérance à l’ambiguité. Planifiez seulement jusqu’à un certain point. Laissez de la place au hasard.
De plus, la réussite n’est pas seulement un facteur de ressources. Bien souvent, les limites des ressources – qu’elles soient matérielles ou temporelles – sont des bénédictions secrètes, car elles nous poussent à nous dépasser et à faire l’impossible, et donc à faire de notre mieux. Car comme le dit Earl Nightingale dans Lead the fied, le désir est plus puissant que la satisfaction de l’accomplissement. Avoir des ressources illimitées et carte blanche pour un projet peut être une malédiction car cela peut nous donner le sentiment que “c’est dans la poche” et que nous n’avons pas besoin de nous démener pour réussir. Rien ne saurait être plus faux.
  • Chapitre 8 : La colonne vertébrale (spine)
La colonne vertébrale de votre création est votre première idée forte. Vous avez gratté pour trouver une idée, vous l’avez travaillée, et vous l’avez fait éclore en la colonne vertébrale de votre création. Elle sera votre petit secret, celui qui structurera toute votre création et lui donnera une charpente forte autour de laquelle la construire.
Votre colonne vertébrale peut prendre de nombreuses formes. Ainsi la trilogie originelle de La Guerre des étoiles s’inspire fortement des travaux sur la mythologie de l’anthropologue Joseph Campbell et de l’archétype du Héros et de son parcours initiatique. Les 33 variations de Diabelli qu’à composé Beethoven sont toutes basées sur une petite composition de Diabelli. La nouvelle de l’écrivain américain Bernard Malamud, The Natural, sur la réapparition mystérieuse d’un joueur de baseball réputé disparu il y a 20 ans, est basée sur la mythologie de la Quête du Graal.
Une fois que vous aurez accepté la puissance de la colonne vertébrale dans l’acte créatif, vous deviendrez beaucoup plus efficace dans votre créativité.
  • Chapitre 9 : Les compétences (skill)
Au plus vous connaîtrez les tenants et aboutissants de votre métier, au plus vous pourrez exprimer vos talents. Les grands compositeurs sont souvent d’éblouissants musiciens. Un grand chef cuisinier peut hacher et découper mieux que n’importe qui dans sa cuisine. Les meilleurs écrivains sont ceux qui lisent le mieux et le plus. Un entrepreneur à succès peut faire tout et n’importe quoi – entreposer des marchandises dans l’entrepôt, négocier avec des vendeurs, développer un produit, construire une campagne marketing, conclure un contrat –  aussi bien, si ce n’est mieux, que tous ceux qui travaillent pour lui.
Le savoir-faire est ce qui permet de créer un pont entre ce que nous voyons dans notre esprit et ce que nous pouvons produire.  Il est ainsi vital d’être conscient de ses forces et de ses talents – vous pouvez commencer par Strenghts Finder – car c’est ce qui vous permettra de vous distinguer, de porter haut et fort le message que vous avez à faire passer au monde.
Il faut donc sans cesse améliorer et affiner ses compétences, et pas seulement en répétant et en s’exerçant. L’entraînement n’amène pas à la perfection. L’entraînement parfait amène à la perfection. Une fois que vous aurez développé un ensemble de compétences, vous pourrez vous appuyer dessus votre confiance en vous. Et la personnalité est une compétence comme une autre. Vous pouvez choisir et développer de nouveaux aspects de celle-ci qui attireront les personnes à vous et fera qu’ils voudront vous aider à apprendre et à vous améliorer. Voir Lead the fied.
Mais attention à ce que l’expérience ne soit pas le cercueil de vos innovations. La technique n’est pas tout. Quelque chose de plus est requis – ou peut-être quelque chose de moins. En effet, souvent l’inexpérience efface la peur – car elle empêche de se représenter clairement quels sont les obstacles qui vont se présenter à nous. Ainsi, elle nous permet de réaliser des choses que nous aurions cru impossibles avec plus d’expérience.
Si vous arrivez à trouver le parfait équilibre entre le développement de vos compétences et l’ouverture sur le hasard et l’ambiguïté, alors vous atteindrez peut-être l’état de grâce, la maîtrise complète de votre domaine qui fera de vous un expert demandé et reconnu.
  • Chapitre 10 : L’enlisement et les voies d’accélération (ruts and grooves)

Parfois, cela arrive : malgré toutes les bonnes habitudes que vous avez développé, les rituels de préparation, les outils d’organisation, les techniques pour gratter les premières idées, il y a un moment où la créativité vous quitte. Vous êtes devant la toile, la page, le clavier, l’écran, et rien ne vient. Vous êtes enlisé. Malgré tous vos efforts, vos roues ne font que patiner sans vous faire avancer, éclaboussant tout le monde autour de vous.
Un enlisement peut-être la conséquence :
    • D’une mauvaise idée. Vous n’auriez pas dû commencer ce projet au départ.
    • D’un mauvais timing. Pour une raison ou une autre, vous êtes désynchronisé avec le monde.  Vous pouvez avoir l’idée la plus lumineuse du siècle, si le monde n’est pas prêt à la recevoir, vous pouvez patiner pendant des années.
    • D’une malchance. Les circonstances conspirent contre vous.
    • Du fait de se cantonner à des méthodes testées et approuvées, alors que le monde a changé et en requiert de nouvelles.
Il n’est pas toujours évident de s’apercevoir que nous sommes enlisés. Nous devons d’abord 1) voir que nous le sommes, 2) l’admettre et 3) en sortir.
Si vous vous apercevez que vous êtes prisonnier d’un profond enlisement, ce dont vous avez réellement besoin est d’une nouvelle idée. Pour cela, Twyla Tharp propose de nombreuses astuces et autres trucs. Vous pouvez aussi pratiquer ce que propose Earl Nightingale dans Lead the fied (toujours) : prendre une feuille de papier, y écrire en haut votre problème, puis en dessous toutes les idées qui vous viennent à l’esprit pour le résoudre. Ne vous arrêtez pas avant d’en avoir écrit au moins 20. Souvent, les premières viennent facilement, puis à partir d’un certain seuil, qui peut être la cinquième ou la dixième, trouver les autres devient difficile, voire très difficile. Et pourtant, c’est souvent la dix-neuvième ou la vingtième qui vous apportera la solution. Persévérez.
Mais les enlisements ont leur pendant, les voies d’accélération. La voie d’accélération est le meilleur endroit du monde. Quand vous y êtes, vous avez la liberté d’explorer, tout ce que vous questionnez vous amène à de nouvelles avenues et de nouvelles routes, tout ce que vous touchez touche miraculeusement quelque chose d’autre et le transforme en quelque chose de mieux. Quand vous vous levez le matin, vous savez exactement ce que vous allez faire de votre journée. C’est ce que les athlètes appellent “la zone”.
Le problème de la voie d’accélération est que vous savez rarement que vous allez vous y engager avant d’y être. N’importe quoi peut vous y amener, et parfois les raisons vous sembleront mystérieuses. Et le lendemain, la voie est partie. Ou elle dure plusieurs jours, semaines, mois. Vous ne le savez pas.
Il est donc important d’en tirer le meilleur parti, et de pouvoir l’allonger au maximum. Twyla Tharp nous donne plusieurs de ses astuces pour y arriver.
    • Exercice 27 : Faites un verbe
Quand vous êtes dans une impasse créative, faites cet exercice. Prenez un verbe et faites le physiquement. Cela peut-être n’importe quel verbe impliquant une action réalisable, comme pousser, sauter, courir, marcher, se tortiller, tournoyer, etc. La chimie du cerveau est inséparable de la chimie du corps. En donnant l’occasion à ce dernier de s’exprimer différemment, vous donnez l’occasion à votre cerveau de penser autrement.
  • Chapitre 11 : Un “A” en échec (an “A” in failure)
Il est très important d’échouer. Les meilleurs échecs sont les échecs privés que vous faites dans le confinement de votre bureau. Les échecs privés sont géniaux.
Qu’est-ce qui est aussi merveilleux à propos de ces échecs ? C’est simple : au plus vous échouerez en privé, au moins vous échouerez en public. De bien des manières, l’acte créatif est une affaire d’édition. Vous supprimez ou modifiez les mauvaises idées qui ne vont pas plaire au public. Cela exerce notre jugement. Il y a plusieurs manières d’échouer :
    • L’échec des compétences. Vous avez une idée en tête mais n’avez pas les compétences requises pour la mettre en pratique.
    • L’échec du concept. Vous avez une idée faiblement construite qui ne s’insère pas correctement dans votre vie.
    • L’échec du jugement. Vous laissez quelque chose dans votre idée ou votre projet qui aurait dû être retiré – et cela déséquilibre l’ensemble de votre création.
    • L’échec des nerfs. La pire. Vous avez tout ce qu’il faut pour vous excepté les tripes nécessaires pour supporter votre idée et l’explorer à son plein potentiel.
    • L’échec des répétitions. Malgré avoir essuyé un ou plusieurs échecs semblables, vous répétez les mêmes erreurs.
    • L’échec de la négation. La plus profonde. Créer quelque chose de nouveau et de frais est un acte audacieux, présompteux. Vous considérez que le monde se sent concerné par ce que vous avez à dire. Et s’il ne sent vraiment pas concerné, vous vous enfermez dans le déni en vous sentant incompris et en maudissant le monde qui ne comprend pas votre génie.
Twyla Tharp nous livre ensuite une intéressante expérience personnelle de semi-échec en nous racontant la douloureuse genèse de Movin’Out – le spectacle même dont vous avez pu voir un extrait sur Youtube en début d’article.
  • Chapitre 12 : La course de fond (the long run)
Ce n’est qu’à 58 ans que Twyla Tharp s’est finalement senti comme un “maître de la chorégraphie”. Pour la première fois de sa carrière, à l’occasion de son 128 ème ballet, The Brahms-Haydn Variations, elle s’est sentie parfaitement maître de tous les composants qui font la danse – la musique, les pas, les motifs, le déploiement des personnes sur la scène, la clarté de l’objectif. Elle avait finalement les compétences pour remplir le gouffre qui se trouvait entre ce qu’elle voyait dans son esprit et ce qui se passait effectivement sur scène.
L’achèvement de la maîtrise prend du temps. Soyez patient. N’abandonnez jamais.
Critique de “Devenir Créatif”:
Après le très sec GTD, ce livre est d’un grand rafraîchissement. Il est agréable à lire, bourré d’idées, d’astuces et de méthodes pour développer et entretenir sa créativité, dans à peu près n’importe quel domaine. Il m’a donné de nombreuses idées pour l’écriture, le business, et même pour le théâtre d’impro que je pratique en tant qu’amateur. Il est tellement riche que chacun y trouvera son compte, et vous mettrez longtemps avant d’épuiser complètement les exercices proposés à la fin de chaque chapitre. Ils pourront d’ailleurs servir de routines solides pour stimuler votre créativité dans à peu près n’importe quelle situation. De plus, le livre est parsemé d’anecdotes et d’exemples directement tirés de la vie et la carrière de Twyla Tharp, qui illustrent souvent parfaitement son propos.
Au chapitre des faiblesses, je dirai simplement que Twyla Tharp insiste beaucoup sur le domaine des arts – non seulement la danse, qui est logiquement sur-représenté, mais aussi la musique, la peinture et l’écriture – et que la créativité propre au business n’est qu’esquissée. On ne saurait toutefois reprocher à Twyla Tharp de parler de ce qu’elle connaît, et la quasi totalité de ce qu’elle dit peut-être appliquée à n’importe quelle situation de création – qu’elle soit artistique ou non. De plus, comme beaucoup d’artistes, Twyla Tharp ne semble pas avoir de culture scientifique très développée, et cela se sent parfois. L’organisation des chapitres et du livre semble parfois un peu touffu, un peu foisonnant. Mais ce sont des défauts mineurs au regard de l’intérêt de l’oeuvre.
Je le recommande donc. Ce livre pourra vous accompagner dans tous vos moments créatifs et vous servir de trousse de secours en cas de panne d’inspiration.

Les 7 erreurs à éviter sur le chemin du mieux-être :
Erreur n°1 - Rechercher vos problèmes sur internet
La première erreur que j’ai faite, ça a été de chercher mes problèmes sur internet. J’ai recherché mes symptômes, lu des pages et des pages sur Doctissimo… et du jour au lendemain je me suis retrouvé avec 5 maladies supplémentaires et 10 nouvelles angoisses ! C’est l’erreur la plus courante et la plus destructrice, évitez-la à tout prix.
A la place, cherchez plutôt des solutions, des choses positives, des moyens d’aller mieux et d’améliorer votre vie. Concentrez-vous sur ce qui peut vous faire du bien, sur ce qui peut vous apporter du mieux-être dans votre vie : des nouveaux remèdes, techniques, thématiques que vous ne connaissez pas. Ne réinventez pas la roue : trouvez ce qui fonctionne chez les autres, ce qui génèrent des résultats positifs, et essayez-le !
Se concentrer sur ce qui fonctionne est une des clefs majeures de la sérénité.
Erreur n°2 - Garder ce que vous vivez pour vous
La deuxième erreur que j’ai faîte, ça a été de croire que personne ne pourrait me comprendre. J’ai gardé ce que je vivais pour moi, je l’ai caché, masqué. J’ai eu tort, et là aussi c’est une erreur courante. Le fait de cacher ce que l’on vit, cela revient à rejeter une partie de nous-même. On ne souhaite pas la montrer, donc inconsciemment on se dit « je ne l’accepte pas ». Le problème, c’est qu’en rejetant une partie de soi-même, on lui donne en fait encore plus d’énergie… que ce soit une angoisse, une colère, ou une tristesse. On ne veut plus vivre ce mal-être, mais en gardant ce que l’on vit en nous, on augmente son intensité ! La solution à cette erreur : être pleinement authentique. Vous devez avoir le courage d'exprimer ce que vous vivez sans vous soucier de ce que pensent les autres. Soyez simplement honnête, et dîtes simplement aux autres ce que vous traversez. C’est le meilleur moyen de vous en libérer ! D’une part vous permettrez aux autres de vous aider, et d’autre part vous vous rendrez compte que de nombreuses personnes sont dans la même situation que vous et n’osent tout simplement pas en parler. En étant authentique et en vous montrant vulnérable, non seulement vous vous libérerez, mais vous permettrez en plus à nombreuses personnes d’en faire de même !
Erreur n°3 - Croire que quelqu’un va venir vous sauver
Au tout début quand je n’allais pas bien, j’ai longtemps attendu un miracle. Je me disais que je me réveillerais un jour et que mes problèmes auraient disparu : plus d’angoisse, plus de mal-être, plus de fatigue. Je croyais que la sérénité, la joie et le bonheur allaient me tomber dessus un beau matin, ou que quelqu’un allait m’apporter tout ça sur un plateau… malheureusement, je me suis vite rendu compte de mon erreur : les jours passaient, et non seulement rien ne changeait, mais en plus ma situation s’aggravait de plus en plus ! J’avais beau aller voir tous les médecins, les psychiatres, les thérapeutes… mais vu que j’attendais qu’ils me sauvent, ma situation ne bougeait pas d’un petit doigt. Et puis un jour, j’ai compris : j’ai pris conscience que c’était à moi de faire le travail. Des personnes peuvent nous tendre la main… mais c’est à nous de savoir les saisir ! Des personnes peuvent nous donner une marche à suivre… mais c’est à nous d’avancer et de mettre un pas devant l’autre !
Des personnes peuvent nous donner des conseils, des techniques, des astuces… mais c’est à nous de les appliquer ! J’ai pris conscience que oui, des personnes, des remèdes ou des thérapies étaient à ma disposition, mais qu’au préalable, c’était avant tout à moi de prendre mes responsabilités et de choisir de m’en sortir. Et c’est ce que j’ai fait ;-)
Erreur n°4 - Apprendre, découvrir, lire… mais ne rien mettre en pratique
Quand j’ai enfin pris la décision d’avancer et de générer d’avantage de mieux être dans ma vie, j’ai fait une quatrième erreur, très courante elle aussi. Cette erreur : vouloir apprendre, lire et découvrir absolument tout ce qui existait de positif… sans pour autant mettre quoi que ce soit en pratique ! C’est justement ce que j’ai fait au départ : absorber beaucoup de choses mentalement, mais ne rien mettre en place concrètement. Rien ne changeait et je ne voyais aucune amélioration…Petit à petit, j’ai pris conscience de mon erreur, et j’ai donc commencé à mettre en pratique réellement ce que j’apprenais : j’ai appliqué les exercices, je suis passé à l’action et j’ai dépassé mes peurs un petit pas après l’autre. Ce n’est qu’à partir du moment où j’ai réellement commencé à appliquer et à mettre en pratique ce que j’apprenais que ma vie a véritablement commencé à s’améliorer : sérénité, confiance, positivité… puis ensuite joie, gratitude, bonheur ! Tout cela a commencé à se déverser dans ma vie, non pas car « j’apprenais » des choses, mais surtout car je les « appliquais ». Si vous évitez cette erreur, non seulement vous irez mieux vous aussi, mais vous gagnerez en plus beaucoup de temps et épargnerez beaucoup d’argent.
Erreur n°5 - vouloir tout appliquer à la fois
Quand j’ai enfin compris l’importance d’appliquer réellement ce que j’apprenais, je suis là encore tombé dans une 5ème erreur : vouloir appliquer tout à la fois ! La même semaine, je voulais : en finir avec la crise d’angoisse, devenir un pro de la méditation, changer mon alimentation, arrêter de fumer, me coucher plus tôt, dépasser plus de peurs, penser plus positivement etc. …et en voulant tout faire d’un coup, je ne faisais finalement RIEN. Le fait de me disperser et d’aller dans tous les sens faisait que j’enclenchais beaucoup de choses, mais ne persévérais dans rien. Je mettais en pratique, certes, mais abandonnais au bout d’un jour ! Par la suite, je me suis rendu compte que ce n’est pas juste le fait d’essayer qui apporte du mieux-être, mais c’est surtout le fait d’approfondir et de persévérer ! En effet, quand j’ai compris cela, je me suis plutôt focalisé sur une chose à la fois. Je choisissais un objectif, un exercice, et je m’y tenais pendant au moins quelques jours, jusqu’à ce que je ressente vraiment les bienfaits. J’ai pu ainsi expérimenter vraiment et surtout observer de réels changements dans ma vie.
Evitez vous donc cette erreur et appliquez une à deux choses à la fois maximum. Et souvenez-vous : une seule technique bien appliquée vaut mieux que 10 juste essayées…
Erreur n°6 - forcer et se mettre la pression
Cette sixième erreur est assez vicieuse, et même si on est vigilant, il arrive souvent que l’on tombe dans le piège. En ce qui me concerne, après avoir compris qu’il valait mieux traiter un sujet à la fois, j’ai donc voulu y aller A FOND. J’en choisissais un, et j’y allais en force. Je m’obligeais littéralement à avancer, à passer à l’action, même quand mon être tout entier me disait d’y aller plus doucement, plus sereinement.
Non seulement je ne m’écoutais pas, mais en plus je me mettais une pression énorme !
Cette attitude, plutôt que de générer des bienfaits, provoquait l’effet inverse : cela générait encore plus de stress, encore plus de résistances et encore plus de blocages… jusqu’à me dégouter complètement d’agir ! Du coup je m’en voulais, je culpabilisais, et je déprimais. Voyant bien que cela ne marchait pas, j’ai essayé une autre stratégie : la méthode des petits pas. Plutôt que de me forcer à faire des pas de géant que je n’étais pas capable de faire, j’ai décidé à la place de faire des tout petits pas très régulièrement, avec bienveillance et douceur envers moi-même. Résultat : ma vie s’est littéralement transformée ! Que ce soit ma santé, ma sérénité, mes relations, mes projets… tout a commencé à évoluer à une vitesse impressionnante, et avec beaucoup plus de facilité.
Evitez cette erreur, et plutôt que de vous mettre la pression, avancez simplement jour après jour, petit pas après petit pas. Vous remarquerez vite des changements ;-)
Erreur n°7 - Avancer tout seul, sans l’aide de personne
Cette dernière erreur, c’est peut-être la pire et je ne la souhaite donc à personne : chercher à tout prix à s’en sortir… TOUT SEUL !
C’est une erreur qui peut non seulement vous rendre la tâche beaucoup plus difficile qu’elle ne l’est en réalité, mais en plus vous faire perdre un temps considérable.
Pour venir à bout de mon mal-être, j’ai commencé par demander de l’aide de médecins, de psychiatres… et vu qu’ils ne me proposaient que des médicaments, je me disais : « ok j’ai essayé de demander de l’aide, ça ne m’a pas aidé, donc maintenant je vais m’en sortir tout seul ! » Non, c’est une erreur. Vous devez simplement trouver la bonne personne. Après quelques temps, j’ai donc recommencé à chercher de l’aide et je suis cette fois-ci tombé sur des personnes qui non seulement avaient connu les même problèmes que moi, mais qui en plus s’en étaient complètement sortis. Trouver ce genre de personne est un raccourci express vers le mieux être, puisqu’ils connaissent les solutions, les priorités et même les pièges à éviter !
L’idéal est de trouver quelqu’un qui a vécu les même problèmes que vous, et qui pourra vous accompagner pour en sortir plus vite.
Conclusion : faites de votre mieux afin d'éviter ces 7 erreurs !
Ca y est, vous être maintenant mieux armé pour éviter les 7 principaux pièges dans lesquels je suis tombé. J’espère que cela vous aidera à les éviter et vous permettra de vous diriger plus sereinement vers le mieux-être.
Vous devriez recevoir la première fiche sous peu, mais avant j’ai une proposition à vous faire : j’ai créé récemment un programme en 8 semaines pour accompagner ceux qui le souhaitent vers d’avantage de mieux-être : le programme « instant sérénité ».
Il regroupe 36 fiches synthèses/actions structurées en 8 semaines sur les principaux thèmes qui ont été responsables de mon cheminement vers plus d’équilibre, de liberté et de paix intérieure
Je souhaite vous proposer une offre spéciale, disponible simplement pendant quelques jours, afin de vous motiver à passer à l’action. Ces fiches ont déjà aidé plusieurs centaines de personnes, et elles en aideront des centaines d’autres. Je suis donc intimement persuadé qu’elles vous aideront, c’est pourquoi je propose même une garantie satisfait ou remboursé sur 30 jours.
Cela dit je sais aussi que seules les personnes qui veulent vraiment s’en sortir vite et mettre toutes les chances de leur côté saisiront cette opportunité. Je souhaite donc privilégier ces personnes au travers de cette offre très spéciale disponible exclusivement pour les prochains jours.
Si cela ne vous intéresse pas, aucun soucis, vous recevrez quand même les 5 fiches offertes dans les jours qui viennent. Vous y trouverez notamment des conseils de respiration, des astuces pour mieux dormir, et d'autres ressources pratiques pour vous aider à avancer. C'est un cadeau que j'aurais aimé avoir et donc que je souhaite vous faire.
Si en revanche vous êtes motivé et vous voulez tout suite avoir accès à un concentré de mieux-être au travers de 36 fiches ludiques, alors c’est par ici que ça se passe ;-)



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